Il aura fallu presque trois ans pour que Fugazi amène un successeur à Red Medicine. Ian MacKaye et ses potes continuent d'aventurer leur post-hardcore qui évoluait déjà vers des côtés plus art punk.
End Hits confirme cette dernière impression. Disque plus épuré, habité de morceaux plus en retenue, sans délaisser pour autant les autres coupés par des explosions bienvenues et libératrices, on y ressent çà et là même un certain swing dans la musique des Américains, même si l'on sait que le genre s'attribue plus au jazz qu'au rock. Ici, c'est plus lent et tortueux. En écoutant, il est plaisant d'emprunter les lignes claires et les courbes mélodieuses en gesticulant au milieu du salon tel un Guy Picciotto dans ses délires dansants : "Break", qui ouvre l'album, donne l'humeur avant de dévoiler le premier orage en sa fin avant le nerveux "Place Position". "Recap Modotti" surprend par son calme aérien, son halo crépusculaire et mystérieux ; ce titre est, pour tout dire, fantastique. "Floating Boy" s'immisce doucement jusqu'à la coupure nette pour son autre partie plus vénéneuse. Les guitares ronronnent gravement, une clarinette souffle des bourdonnements à l'image d'un insecte volant fou.
Les morceaux plus explosifs ont un peu moins de place mais font leur effet comme "Foreman's Dog" et bien entendu "Guilford Fall" avec son envolée épique formidable. Ce dernier est le feu d'artifice avant que le murmurant "Pink Frosty" embrume dans sa berceuse paisible mais sombre.
Un très bon album encore, qui a été jugé, par ce qu'on a pu entendre, en deçà des deux précédents. End Hits est tout de même riche en trouvailles, en breaks, en accalmies fascinantes, sans omettre comme un changement plus clair dans la production du son et montre que Fugazi avance en ne se répétant pas dans ses compositions.