Quentin Tarantino aurait du être DJ ou du moins rendre sa playlist publique, il en va d’un geste pour l’humanité. Film après film, l’Américain marque ses fans aussi bien par la qualité des histoires qu’il porte à l’écran que par les musiques qui les accompagnent. Si bien que 20 ans après, tout le monde se souvient de Chuck Berry et son You Never Can Tell dans la mythique scène de danse de Pulp Fiction entre Uma Thurman et John Travolta ou de Misirlou de Dick Dale toujours dans le même film. Tout le monde se souvient également de Battle Without Honor Or Humanity de Tomoyasu Hotei qui a servi la cause de Kill Bill. Et j’en passe… Tarantino sait apposer mieux que quiconque à chacun de ses films un univers musical bien particulier qui nous permet de les identifier.

Django Unchained, dernier né de l’esprit fou du génial réalisateur ne déroge pas à la règle et propose quelques morceaux du feu de Dieu. Entre Django, chanson éponyme du film, Freedom d’Anthony Hamilton et Elayna Boynton, du Johnny Cash ou encore l’excellent Who Did That To You de John Legend, Tarantino nous plonge cette fois dans les ambiances blues du Sud des Etats-Unis et folks des westerns américains. Symbole de cette atmosphère, un titre marque véritablement le film, Too Old To Die Young de Brother Dege.

La folk du morceau et la puissance qui s’en dégage scotche immédiatement le spectateur à son siège. Tarantino a encore eu du flair en trouvant cette pépite. Cette pépite, c’est aussi bien le titre en lui-même que son interprète.

Brother Dege aka. Dege Legg (à prononcer Deej – Leg) est un artiste atypique. Bien loin d’être ultra-connu (sa page Facebook ne compte que 2000 fans pour le moment), le chanteur a néanmoins réussi à tirer profit de l’ultra-médiatisation du dernier Tarantino pour se faire un petit nom sur la toile. Originaire du sud des Etats-Unis, théâtre des aventures de Django et du “docteur” Schultz, Dege Legg s’est inspiré de cet univers gorgé d’histoire(s) pour composer ses titres chez lui, en Louisiane.

C’est qu’avec son album, Dege arrive à nous retranscrire l’atmosphère de cet Etat profondément marqué par l’histoire de France. Un Etat américain (depuis 1803 et sa vente par Napoléon Bonaparte) violent, victime des affres de la ségrégation raciale de la fin 19ème et du début 20ème et des exactions du Ku Klux Klan et de ses groupuscules (en parlant de ça, je ne peux que vous conseiller de voir l’excellent Mississippi Burning).

Un Etat qui a également joué un rôle majeur dans l’histoire de la musique américaine à l’instar de ses voisins, le Mississippi et l’Alabama, le blues -chanté dans les champs de cotons- étant un pur “produit” local avant de s’étendre sur le territoire américain. Cela a son importance pour Dege qui retranscrit dès les premières notes de Hard Row to Hoe -premier titre de l’album- son penchant pour le genre. Et avouons-le, ça dépote. La gratte et la voix du bonhomme ne font qu’un, le rendu est excellent. Entre brutalité et mélancolie, Dege arrive à nous faire rentrer dans son univers en deux-deux. La voix profonde de notre “Américain aux cheveux longs” nous transporte, si bien que rapidement, on se croirait aussi bien dans la nature hostile des marais cajuns en compagnie de ses alligators qu’en train de chevaucher un mustang en direction des grandes plaines de l’ouest américain.

Pour entretenir le côté brut et nature de ses titres, Dege Legg a d’ailleurs commencé à enregistrer ses morceaux, dès 2009, dans des endroits pour le moins atypiques (cages d’ascenseur, champs, maisons abandonnées, etc.) avant de perfectionner ça chez lui pour une sortie d’album, un an après, en 2010.

Pourquoi tout ce laïus me direz-vous ? Pour vous recommander d’écouter sans plus tarder cet artiste pardi ! Les 10 titres tantôt folk, tantôt blues s’écoutent rapidement et s’enchaînent sans problèmes. Outre la géniale Too Old To Die Young, chanson phare de l’album mis sous les projecteurs par Tarantino, j’ai un vrai coup de coeur pour House Of The Dying Sun et sa montée en puissance crescendo, assurément l’un des titres de l’album. A ne pas négliger non plus : The Battle Of New Orleans et ses solos de grattes, le riff prenant de Dead & Gone, le très “Black Keysien” The World’s Longest Hotdog, la ballade d’Old Angel Midnight ou le très bon Black Is The Night qui ponctue l’album. En fait, tout vaut le coup et ça serait vraiment bête de passer à côté de cet artiste encore très (trop) peu connu. Pour rectifier le tir, vous pourrez trouver ci-dessous le disque dans son intégralité avant de vous rendre sur sa page Facebook. Un seul bémol tout de même, après écoute, vous aurez sans doute envie de partir vers les terres sauvages des Etats-Unis…
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le 24 mars 2013

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