Remords d'une ombre
Les bras croisés sur son torse nappé de miel, un jeune garçon songe à la mort. Encerclé par des dizaines de mains cramponnées à des stylos, grattant lignes sur lignes avec fureur, il se sent comme un...
le 11 mai 2017
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Enfant, il était obsédé par les photos d'astronautes. En noir et blanc, les ombres crâneuses étiraient leur décadence sur un papier glacé bien loin de rivaliser avec les sols lunaires ou martiens qu'il affectionnait tant. Alors, comme pour fixer sa cicatrice (il ne pourrait jamais poser un peton sur la lune, son corps tombait en miettes et ses poumons avaient déjà du mal à composer avec l'atmosphère terrestre) il collectionnait les clichés de ses idoles, les collant soigneusement dans de gros cahiers aux pages blanches et gourmandes. Ses parents se réjouissaient de voir le gamin heureux, tranquille, le nez plongé dans ses cahiers, l'esprit dansant dans les étoiles, assis en tailleur au milieu de sa chambre. Sa passion ne le quitta pas lorsqu'il plongea tête la première dans cette étrange période qu'est l'adolescence. Il la traversa en solitaire telle une comète enragée de désir, paumé entre 2 galaxies qu'il ne pouvait toucher, pareil à l'amour disparu d'une mère qu'on passerait 1000 ans à chercher, en vain. Le corps enfoui sous une couche de fringues mal lavées, les yeux planqués derrière une frange au goût de nuit, le voilà qui arrête sa marche incolore au beau milieu du couloir de la fac : une fille aux yeux de feu s'apprête à croiser son chemin. Il tangue sans trop savoir quoi faire ; survivre, déjà, éviter l'implosion. Le vrai croquis de l'Homme in Love n'aura pas trouvé peintre à temps. La fille le dépasse sans le voir et disparait dans l'escalier.
Il a le cœur en miettes et le crâne défragmenté. Le bout de ses doigts picote au rythme de sa respiration : saccadée. Trou Noir, Overlove du système nerveux.
Et si tout l'Univers était à prendre ?
Les synthés fous de THECREATURE retiennent son corps en otage et le voilà qui fonce, comme une étoile filante contre le chaos prémonitoire d'une nuit sans fin,
a-t-il réussi à la rattraper ?
ont-ils débuté quelque chose ?
Le vaisseau est à quai, moteurs vibrants et map bien calibrée, à son bord, ses parents enlacés pleurent doucement, ils quittent la Terre dans quelques poignées de secondes.. Contre sa poitrine il presse l'un de ses cahiers d'astronautes, les yeux vissés sur la silhouette de ses parents : les voilà qui décollent et disparaissent, laissant dans leur sillage un fils unique déboussolé, aux soupirs hésitants.
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Créée
le 5 déc. 2020
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