Conquis par le talent éclatant de Jeanne Cheral dans ses deux premiers albums, j'ai acheté celui-ci dès sa sortie.
Beaucoup plus poétique que ses prédécesseurs, il m'a légèrement déconcerté en dépit de l'excellente qualité de ses textes et de ses musiques. Son caractère évanescent, plus difficile à saisir, m'a échappé pendant quelques années. Je lui avais mis un "6" seulement.
Aujourd'hui, avec davantage de maturité et d'empathie, l'esprit ouvert à cette prose liquide, je saisis toute la subtilité de ces mots accolés comme des bulles de savon flottant dans l'air mais dont l'impact, lorsqu'elles touchent un obstacle, éclabousse alentour.
Très intimiste, cet album se révèle d'une profondeur insoupçonnée. Le voile se lève avec respect sur la condition de certaines femmes inféodées à leur religion, sur des pratiques ancestrales sanglantes et pourtant apparemment tellement "normales". Cette chanson est d'ailleurs à mon goût la plus belle de cet album, vu le doigté avec lequel ce douloureux sujet est abordé. Mais n'est pas aussi d'une grande subtilité que de parler du surpoids en des termes si poétiques ? Partant de sujets de société porteurs de souffrances, Jeanne Cheral parvient à dépasser les poncifs et offrir sa vision, faite de compréhension et de douceur.
Cela donne un album aux tonalités d'une joyeuse tristesse. Certaines mélodies se veulent plus "rock" alors que d'autres baignent dans une douce nostalgie. Sa beauté vient de cette ambivalence assumée.
L'écoute récente de cet album m'a convaincu d'aller rapidement acquérir les albums qui me manquent encore pour mesurer où le sens poétique de l'artiste l'a conduite...
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