Philibert avait un peu la gueule de bois ce matin là en se réveillant vers les 14h45. Il sentait posée sur son crâne une casquette plombée qui semblait s'enraciner tout au fond de sa cervelle brumeuse. Repoussant le drap il s'aperçut qu'il avait dormi tout habillé et qu'il avait dégobillé son 4h de 4h du mat juste devant son pucier déglingo car de guingois depuis un bail. Quand il posa ses tartines 44 on the floor il s'aperçut qu'il lui manquait une godasse et constata qu'un orteil avait crevé sa chaussette tachée de rouge. Il commença à paniquer pensant s'être blessé...du pinard ! C'était du picrate qui avait aussi maculé son falze maintenant bicolore et sa chemise d'une blancheur plus que douteuse.
Putain mais où avait-il pu aller ? Que s'était-il passé ?
Il fit un effort de concentration qui agita la douleur lancinante qui stagnait dans son crâne mais rien, niet, que dalle, que tchi, balpeau, nada !
- NADA oui nada ! Ce groupe qui chantait en espingouin ! Putain mais la claque ! Ça y est j'me souviens ! Cette soirée terrible dans ce bar avec tous ces gus et ces gonzesses de fort calibre qui dansaient comme des demeuré(e)s !
Les images apparurent dans son cerveau renversé d'abord par bribes puis comme un puzzle s'assemble doucement il put reconstituer une partie de sa nuit le reste s'étant envolé avec les brumes de l'alcool et du chichon.
Franchement ces clopes enduites de résine de cannabis lui avaient fait beaucoup de mal. Cette fille qu'était-elle devenue ou était-ce un garçon avec des cheveux longs ce n'était pas très clair. Il avait piccolé toute la nuit et surtout vibré à la musique de ce collectif bordelik de zicos. Maintenant malgré sa caboche en travers, malodorante et fracassée les sons lui revenaient aussi. C'était vraiment bien quelle musique de fête et puis la patate de ces rythmes Cubains, caraïbes en diable...ombre de Camilo, un peu hip hop, un peu ragga, un peu français, un peu arabe à la Zebda franchement espagnol. Superbe mélange ! Encore un petit effort et quelques paroles revinrent, Phil se surpris même à fredonner le texte de "Ils nous emmerdent" :
Il veulent tomber la pluie pas la foudre et le tonnerre
Ils veulent changer les choses sans la rage et la colère
Ils veulent des roses sans épines des raisins sans pépins
Ils veulent des livres scolaires sans le massacre des indiens
Ils veulent la vie sans la mort et l'amour sans la tristesse
Il veulent sud america sans Castro ni Chavez
Les richesses de l'Afrique sans culpabiliser
Les ouvriers sans grève et du rap javellisé
Ils nous emmerdent, ils nous irritent, ils nous fatiguent à en péter des durites
https://www.youtube.com/watch?v=ZxxX42Wo8Bc
Vaguement heureux mais encore chancelant et décontenancé de ne pas se souvenir de tout Philibert décida de ranger, de nettoyer un peu sa piaule et lui même. Fort de de ses dix huit ans il eut vite fait de faire disparaitre toute trace avant le retour des "Vieux" qui ne manqueraient pas de lui squatter le cerveau avec leurs questions à la con et leurs conseils périmés.
Alors vautré sur le pageot cabossé, il lança Sidi Wacho sur son teppaz, alluma une cibiche et porté par les volutes bleutées, les sons "caraïbes" il ferma les yeux et s'envola au pays de la réve...olution, au delà des océans tout là bas à Cuba...Libre !