Bond ... Lou Bond
Classique presque oublié, l'album éponyme de Lou Bond de 1974 évoque un sentiment de changement, une collection de chansons abordant une gamme de sujets allant des droits civiques à l'injustice...
Par
le 28 juil. 2024
1 j'aime
2
Il y a encore quelques jours, je n'avais jamais entendu parler ni de cet artiste, ni de son unique album.
J'en ai terminé l'écoute il y a quelques minutes, et je suis encore suspendu dans un ailleurs spatio-temporel flottant et délicieux.
Je joue à une "Battle pop" sur Facebook depuis quelques temps, où chaque joueur choisit un artiste pour le mois, et les joueurs font s'affronter, chanson par chanson, leur poulain lors de duels. Quelqu'un a proposé Lou Bond "Lucky Me" contre un morceau d'Explosions in the Sky, donc avant de voter j'ai voulu écouter le 007 de la soul, et ce fut le choc.
A la manière d'un Sixto Rodriguez, Bond a sombré dans un injuste oubli, des samples par Prodigy et Outkast ayant révélé depuis quelques années son existence à quelques happy few, avant que le label Light in the Attic (les re-découvreurs de Rodriguez, d'ailleurs) ne braque leur faisceau sur son ombre oubliée (notez le paradoxe métaphorique). Lou Bond donc. Il tente dans les 60's un trip to Chicago, où il enregistre deux 45t sans succès, avant de retourner à Memphis enregistrer en 74 cet unique album chez Stax.
Malheureusement, un obscur litige fera que l'album sera à peine distribué et que Bond se retrouve condamné à l'oubli, jusqu'à sa mort en 2013. Au moment où j'écris ces lignes, ce chef d’œuvre n'a que 17 écoutes sur Senscritique, une poignée d'articles en ligne signalant son excellence confidentielle, une moyenne respectable et une côte relativement accessible sur Discogs (avis aux amateurs), et quelques uns de mes amis les plus pointus musicalement n'en ont jamais entendu parler non (tort réparé).
A quoi ressemble ce disque ? 6 morceaux, les deux plus courts au début, dont le would-have-been-single "Lucky Me", tristement ironique, puis quatre longues plages oscillant entre 7 et 12 minutes. Le tout dans une irréprochable soul d'une élégance folle, portée par les cuivres des Bar Kays et l'orchestre symphonique de Memphis, orchestrations divines aux accents classiques et aux contrepoints folk qui évoquent pèle-mêle la mélancolie douce d'un Nick Drake et la sensualité pop des Moody Blues à la soul soyeuse et stellaire d'un Curtis Mayfield ou d'un Isaac Hayes, dont on retrouve un collaborateur à la production. Les textes fleurent bon l'engagement de bon aloi, et le simili flow de Bond rappelle parfois Gil Scott Heron, lorsqu'il ne miaule pas de son falsetto vacillant. "To The Establishment" est une protest song épique d'une douceur étonnante, et les cordes pleureuses s'étirent à l'infini tout au long de ce disque solaire et gémissant, tourmenté mais étrangement chaleureux. Un chef d’œuvre, tout simplement.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Disques classieux, Les meilleurs albums de soul, Musiques que je passe au boulot 2 : cette fois mes collègues ont du goût. et Albums écoutés en 2018
Créée
le 11 avr. 2018
Critique lue 254 fois
4 j'aime
1 commentaire
D'autres avis sur Lou Bond
Classique presque oublié, l'album éponyme de Lou Bond de 1974 évoque un sentiment de changement, une collection de chansons abordant une gamme de sujets allant des droits civiques à l'injustice...
Par
le 28 juil. 2024
1 j'aime
2
Du même critique
Pourquoi aimé-je le cinéma ? On devrait se poser cette question plus souvent. Elle m'est venue à l'esprit très rapidement devant ce film. Avec une réponse possible. J'ai d'ailleurs longtemps pensé...
Par
le 29 sept. 2013
129 j'aime
12
Cette humble critique est une réponse, ou lettre ouverte, à trois critiques en particulier :- son titre est emprunté à celle de guyness http://www.senscritique.com/film/Gravity/critique/26614866 -...
Par
le 23 oct. 2013
107 j'aime
32
La cinéma australien au féminin est fécond en portraits de femmes un peu paumées, ou complètement névrosées. Il y a les héroïnes têtues et déterminées de Jane Campion, les monstres effrayants (Animal...
Par
le 31 juil. 2014
106 j'aime
10