J'avoue de jamais avoir entendu parlé de Murmur avant ce second album... Décrit comme du black metal expérimental saupoudré d'influences progressives, jazz et noise, forcemment y avait de quoi titiller ma curiosité. J'ai donc découvert que le quartette américain originaire de Chicago avait déjà réalisé un album et un split avec les curieux et psychédéliques Nachtmystium.
Qu'avons nous avant de commencer l'écoute? pas plus de 9 titres, dont une reprise de King Crimson sur la version digipack (“Larks' Tongues in Aspic, Part II”), des titres tout aussi enigmatiques les uns que les autres (“Al Malik”, “Zeta II Reticuli”) et une très belle cover se referent au Minautaure. A priori, ça sent le triturage de cerveau... “Water from water” ouvre les hostilités sur des arpèges dissonnantes, le batteur Charlie Werber impose des règles plutôt jazzy tout en finesse avant que l'ensemble ne sombre dans un chaos au croisement du black noise et d'un quelque chose “relativement” proche de Magma (les choeurs, la structure, l'emphase) que l'on retrouve dans le titre “Al Malik” justement. A la fois déroutant et pourtant bien ancré dans une certaine tradition musicale, Murmur en remet une couche dans le choix du son, plus proche du lo-fi que du blockbuster qui pourrait rebuter l'amateur metal lambda. Cette tradition musicale est celle de groupe comme Soft Machine, King Crimson bien sûr, Pink Floyd (“When blood leaves”) ou encore plus proche de nous John Zorn qui use du free jazz pour mieux modeler, triturer, accelerer, répeter leur musique. A cela, Murmur y a distillé son venin issu de genres plus sombre et nihiliste. Le second titre ”Bull of Crete” se démarque du black sans pour autant nous épargner d'une violence plus sourde mais tout aussi destructrice. La destruction, tout autant que le déconstruction, serait d'ailleurs le mot d'ordre des quatres gars de l'Illinois que l'on reconnait à Ved Buens Ende (la seconde partie d'”Al Malik” en témoigne).
De bruit et de fureur, Murmur sait tout autant nous surprendre sur le titre “Recuerdos” à la guitare acoustique, aux synthés krautrock qui n'attendraient presque que le chant de Tom Yorke de Radiohead. Un titre à part qui nous permet de respirer avant de suffoquer à nouveau dans le “Zeta II Reticuli” qui décolle sournoisement avant de s'embarquer dans des plans barré jazz rock, serivis par des riffs qui rappellent les expérimentations d'un Rollins Band. La batterie est toujours au top et on ne peut que saluer tout au long de l'album le gros travail d'arrangements surtout au niveau des différentes textures vocales (crié, gueulé, vociféré), des choeurs. Enfin la suffocante reprise de King Crimson achève l'album dans un chaos épique d'excellente facture.
Le coté “arty”, hermétique, de Murmur en agacera certains mais on ne peut que se réjouir de la créativité sans borne des Américains qui redonnent ses lettres de noblesse à une conception de la musique un peu oublié ces dernières années : l'improvisation. Pour cela, il faut une grande confiance et une tout aussi grande maitrise instrumentales au service d'une musique à la fois novatrice et héritière des courrants les plus avant-gardiste des 70's.