Et si on rentrait dans l'arrière salle du cabaret où s'égosille Tom Waits et que l'on tombait sur ses cinq fils plus ou moins légitimes jouant un rock déjantesque sous amphet' ?
Mené par le charismatique moustachu Honus Honus (oui, les quatre autres pseudos sont du même goût) au piano et au chant éraillé, le groupe nous livre un rock expérimental sautillant au son un peu cirquesque et très joyeux bordel. Car oui, les morceaux sont foutraques où se croisent saxo, basse, xylophone, flûte, trompette, tambourin, kazoo... et diverses percussions étranges, sur lesquels viennent s'ajouter des chœurs entonnés tapant parfois dans l'onomatopée. Et là où on pourrait craindre une soupe indigeste fusionnant Gogol Bordello et Mr Bungle, la mélodie est bien là, entêtante, et tous les éléments tapageurs s'enclenchent parfaitement sur l'album Rabbit Habits (les deux précédents sont parfois un poil plus durs à digérer par contre, bien que traversés par des moments de haut vol).
Man Man nous fait rentrer avec énergie dans son univers particulier de poésie absurde, flirtant allégrement avec la folie éthylique portée par des paroles surréalistes. Énergie oui, mais aussi tristesse du bourru imbibé sur des morceaux calmes, complaintes mélancoliques émouvantes, toujours originales dans les arrangements qui nous bercent dans les larmes alcoolisées d'une fin de soirée dans un cabaret de fin du monde.