Sebolavy
6.8
Sebolavy

Album de Mickey 3D (2016)

Il y a quelque chose qui m'émeut profondément chez Mickael Furnon. Je crois pouvoir dire que c'est mon "chanteur préféré" - pas dans le sens où les jeunes adolescentes l'entendent, mais dans le sens où c'est celui qui me parle le plus, qui m'émeut le plus, et qui produit des chansons correspondant vraiment à ce que j'attends d'une chanson. Ses textes ne sont pas, ou à de très rares exceptions, des textes "d'amour" ; ils ne tirent pas sur la corde usitée du "je t'aime/pas toi/moi non plus", qui ronronne mièvrement au sein de la chanson française depuis... toujours. Pour autant, ses textes ne sont pas non plus férocement engagé - il n'essaie pas, comme Luke l'a fait récemment (RIP à ce groupe que j'aimais bien à ses débuts), de "dégueuler" sur la société, d'insulter et de dénoncer tout le monde. Non. Mickael Furnon se situe à un autre niveau : celui de la vie. De la complexité de la vie, de sa simplicité parfois, de son côté fuyant, difficile, et beau à la fois.
Je pense que Mickael Furnon est le chanteur décomplexé par excellence. Il fait ce qu'il veut, quand il veut. Le souci commercial est rare - même si ce dernier album joue beaucoup (et ce n'est pas pour me déplaire) sur la corde "mélodie facile et entraînante". Soyons honnêtes : Mickey 3D est peu connu ; les heures de gloire remontent au début des années 2000, et ça n'avait pas duré très longtemps.


Mais sieur Furnon s'en fout pas mal - semblerait-il. Il s'éclate. Il écrit, il imagine, il joue, quitte à laisser quelques années s'écouler. Il repart, puis revient, mais sans jamais tout à fait revenir (d'où les guillemets de mon titre) vu qu'il n'a pas consacré deux semaines à soudainement faire plein de chansons : c'est plutôt une anthologie de ce qu'il a imaginé pendant l'intervalle 2009 - 2016.
Il y avait à peu près la même démarche derrière son projet solo, "Mick est tout seul", en 2007.


Bref, j'aime Mickael Furnon car ce n'est pas une "star", mais qu'il garde et entretient un talent fou. D'ailleurs, on l'aura vu, "star" et "talentueux" ne sont pas des termes bilatéraux ! Ce qui frappe chez le désormais quarantenaire, c'est sa lucidité : il voit les choses, les commente, sans jamais trop juger. Il était certes un peu violent à l'époque de "Respire", mais cette violence n'a rien de méchant ou de haineux (coucou Luke, sa va??). C'est un cri de colère, mais aussi d'amour pour une humanité qui s'est perdue en chemin. De colère, parce que Mickael Furnon est conscient des problèmes liés à la société moderne (égoïsme exacerbé, surconsommation, détérioration de la nature) ; d'amour parce qu'il reste sensible à l'humanité, "empathique" si l'on peut dire. Il a conscience qu'on est tous "dans le même panier", que des choix sont inhérents à des nécessités et à des phénomènes qui nous échappent.


Inutile de le préciser : cet album continue l'entreprise discrète et puissante de Mickey 3D. La voix n'est pas formidable, les textes sont travaillés mais pas éblouissants, les mélodies sont efficaces ; bref, le tout est sincère et généreux.


Je précise que dans le commentaire qui va suivre, je reprends "à zéro" par rapport à mon post - les notes vont peut-être changer un peu. Il y a aussi toutes les autres chansons que je n'avais pas commentées à ce moment-là.


La première chanson, "La rose blanche", est un hommage aux jeunes résistants allemands qui se sont pour ainsi dire sacrifiés pour défendre leurs idéaux. Là encore, pas de dénonciation brutale, mais une ode douce à la force et au courage de ces héros. La musique est agréable ; ce n'est pas ma piste préférée, mais elle introduit bien l'album. 8/10


La deuxième chanson, "En léger différé", est très pop, très entraînante. Je l'ai beaucoup écoutée quand ce n'était encore qu'un teaser de l'album à venir. J'ai seulement un peu de mal avec les paroles ; je suis très vite agacé quand on mélange deux langues dans un texte sans transition. Et je trouve que certaines lignes sonnent faux ("Avant que j'perde une épaule", par exemple). Ce n'est bien sûr qu'un ressenti personnel - la chanson reste très sympathique. D'ailleurs, elle montre légèrement le côté politique mais pas engagé des chansons de Mickey 3D : le "Marine et ses amis" qu'il mentionne tient forcément de la satire, mais ils ne font que prendre l'apéro... on est donc loin de la violence de certains groupes (coucou Luke sa va oui moi sa va lol) 8/10


Vient alors "Rallonge tes rêves". Un de mes coups de coeur de cet album. Simple, efficace, malgré un refrain qui aurait gagné à être un peu plus "rond", je trouve la chanson diablement bien menée, sur le plan mélodique comme sur le plan des paroles. Comme je le disais dans mon post, c'est le genre de morceau que j'adore apprendre et chanter. Les paroles sont touchantes, avec ce "tu" général qui peut toucher le commun des mortels. 10/10


Sebolavy. J'ai adoré ce titre dès la première écoute. Puis je l'ai moins aimé. Et adoré à nouveau. J'en suis resté à cette dernière étape. Même si le "tour du monde" est assez agaçant, il connote finalement cette folie universelle que j'aime retrouver chez 3D, ce refus des limites et des conventions, ce côté enfantin (l'enfant revient souvent chez Mickael) mais lucide (les couplets ne font pas beaucoup de cadeaux). Et puis j'adore la mélodie, elle est entraînante et pétillante. La chanson ferait un joli single, je pense.


Que dire d'Aurélia, maintenant ? Je suis mitigé. J'aime bien dans l'ensemble ; je trouve la mélodie intéressante. Par contre, je n'arrive pas à "m'immerger" vraiment dedans ; quand je l'écoute, je peux vite oublier qu'elle tourne sur mon appareil. Bref, ce n'est pas une chanson qui m'a marqué. D'autant que je n'arrive pas à saisir les paroles ; je sais qu'il n'est pas nécessaire de toujours chercher du sens... Mais là, je n'en ai même pas une bribe. 6/10


Les papillons. Certains la trouveront sûrement niaise et un peu trop sucrée. Je n'ai jamais été très convaincu par les interventions féminines - rares mais récurrentes - dans la discographie de Furnon. Une fois encore, j'ai du mal. C'est joli, c'est tout doux, c'est sympa, mais les paroles ne sont pas spécialement intéressantes (même en creusant), et on ne retrouve pas la verve de Mickael ; celle qui fait ses meilleures chansons. 7/10


"J'attends Mylène" est une vraie pièce d'humour dans l'album ; peut-être la plus décalée avec "Le dernier des cinglés". Les paroles ne sont pas très recherchées, et le thème a déjà été abordé 1000x (l'adultère, en gros, mais du point de vue de l'amant). Pour autant, la mélodie est bien travaillée ; comme quasiment toutes les chansons de l'album, il n'y a rien de plat ou d'inécoutable - au contraire, à la première écoute, le titre semble déjà familier. 8/10


Le dernier des cinglés. Celle-là, je ne l'écouterais pas en boucle, mais elle a quelque chose d'original dans son rythme : la folie que l'inconnue lui prêterait se ressent dans le rythme-même de la chanson. Mickael est très ludique dans son approche de la musique (et c'est aussi ça que j'adore). Cette chanson en est un bel exemple. 7/10


Après le grand Canyon. C'est marrant, parmi les gens qui écoutent Mickey 3D autour de moi, peu ont apporté des commentaires très positifs sur cette piste. De mon côté, pourtant, je la trouve vraiment très bien. Mickael reprend le thème de l'écologie, cette fois en s'adressant au chef indien Geronimo. La chanson est efficace, bien rythmée, bien écrite. Une de mes préférées. 9/10


François sous la pluie. Un coup de coeur aussi. "François sous la pluie", dévoilée un peu avant la sortie officielle de l'album, c'est ce que Mickael Furnon sait faire de mieux : de la satire politique, sans entrer dans le vomi crasse (slt luke sa faisait longtemp mdr). François Hollande n'est ni admiré, ni complètement descendu. Il me semble que c'est l'approche la plus saine ; en effet, peut-on vraiment reprocher la situation de la France à un seul homme ? En même temps, peut-on faire comme s'il n'était en rien responsable ? Le chanteur apporte une solution équilibrée : une chanson un peu moqueuse qui ridiculise le dirigeant, qui le remet à sa place, mais qui ne le diabolise pas pour autant.
Le tout très bien enrobé : la mélodie est entraînante et agréable. 10/10


Liberté, égalité, fragilité... est un petit OVNI. Je me souviens (quelle erreur) de l'avoir écouté sous la douche pour la première fois. C'était passer, sans le savoir, à côté de la "clé" de cette chanson. Dans une sorte de slam, ou de rap (je suis nul pour mettre des noms sur ce genre de choses), Mickael propose un panorama éclaté de la France, comme dans un flux d'écriture automatique. Le titre est tout sauf radiophonique. C'est presque de la chanson "expérimentale", en cela qu'il y a un côté fourre-tout dans la démarche. Pour autant, la musique est très travaillée : c'est ce qui m'a manqué lorsque je l'ai écoutée avec des jets d'eau dans les oreilles. Le discours est magnifié, c'est peur dire, par une instrumentale mélancolique, qui traduit bien la valse de Mickey 3D depuis 20 ans : quelque chose qui danse entre l'amour de la France et la mélancolie face aux échec, face aux désillusions.
10/10


Avant le bouquet final débarque l'étrange "Des fleurs dans les cheveux", sorte de mélange peu homogène entre une facilité mélodique à l'américaine et des paroles marrantes, mais sans plus.
En résulte peut-être la chanson que j'aime le moins de l'album, mais que je n'arrive pas à détester pour autant - c'est ça qui fait de "Sebolavy" mon disque préféré de Mr. Furnon. "La grande évasion" avait des titres géniaux, mais il y en a quelques uns qui m'agaçaient au plus haut point ("Yula", par exemple). Ici, rien de tout ça. Juste un titre qui m'indiffère, mais que j'aurais certainement trouvé cool, chanté par quelqu'un d'autre.. 5/10


Et le voilà, pour conclure l'épopée : Jacques, Sylvie et les autres. Une chanson magnifique qui conclue terriblement bien l'album, et qui réunit en quelques minutes tout ce que j'aime chez Mickey 3D : des paroles un peu folles à la limite de l'insolence, de la vulgarité mais pas de la méchanceté, un refrain efficace, des couplets inoubliables. Au terme du voyage "Sebolavy", on aura eu quelques passages à vide, mais ils sont largement compensé par ce plein de bonnes idées, de voyages, de billets pétillants, d'humanité. Vivement le prochain, mais dans tous les cas, je suis conquis.

Botwin
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le 23 avr. 2016

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