Solitude. Un nom donnant une image parfaite de ce que peut être cet album.
Le casque sur les oreilles, je suis seul. Tout en avançant peu à peu dans l’album, je voyage.
Je suis dans une forêt. Il neige abondamment, je ne peux voir plus loin qu’une douzaine de mélèzes. Matin ? Après-midi ? Aucun moyen de savoir. Le ciel est blanc. Tout comme le sol et les arbres. Je suis perdu. Que ressens-je ? Tristesse ? Non, je ne regrette rien. Désespoir. La lune est passée plusieurs fois déjà au-dessus de ma tête en tentant de retrouver mon chemin, en vain. La neige efface les traces, les arbres se ressemblent, j’ai l’impression de tourner en rond. La météo est contre moi, la nature est contre moi, a quoi bon essayer ?
Je hurle. C’est difficile d’accepter la vérité. Et puis, personne ne peut m’entendre. Je me mets a ressasser le passé. Je délire. La fièvre commence à monter, la faim se fait ressentir.
Je m’allonge au pied d’un arbre, abandonnant tout espoir, acceptant mon sort, j’attends l’heure fatidique. Je suis seul.
Solitude.
Je suis sur une barque. Probablement vieille, le bois est partiellement recouvert de mousses détrempées. Un lac, sans courant. La barque est immobile. Pas moyen d’avancer, les rames se décomposent au contact de l’eau. Pourries. Tout comme la surface de ce lac, recouvert de vase verdâtre, paraissant gluante. L’odeur est nauséabonde.
Où est la rive ? Je ne sais pas. Brouillard. Le seul moyen d’avancer est de sortir de la barque et de nager dans la bourbe. Défi impossible, la vision ne me permet pas de nager droit, je tournerai en rond. Et puis, le mélange d’eau et de boue fatigueront mes muscles rapidement.
Je rêve. Je rêve de ces films de pirates où l’un d’entre eux crie « Terre en vue » en haut de son mât, et je me surprends à l’imiter. Puis, je reviens à mes esprits, constatant mon effet ridicule.
Il n’y a pas de terre en vue. Je suis seul, au milieu de ce lac nauséabond.
Solitude.
Puis, changement de décor. Je suis au milieu d’une rivière, luttant contre le courant pour atteindre la rive. Je nage en me démenant. Arrivé à la rive, je lance mon bras, aveuglé par l’eau glaciale dans mes yeux, en espérant attraper quelque chose. Une branche ? Un brin d’herbe ? Ou, au mieux, un bras ? Un bras. J’en rêve depuis bien longtemps, qu’il soit mort ou vivant. En fait, j’en rêve depuis maintenant des semaines, depuis que j’ai mis un pied dans cette rivière. Je ne peux attraper la rive. Je suis emporté par le courant dès que je m’en approche. Personne ne peut m’aider ? Personne. Parce que je suis seul.
Effrayé par cette perspective, pourtant plus que réaliste, je relâche tous mes muscles, et laisse à la rivière la possibilité de décider de mon destin. J’attends, emporté par le courant, tout en pensant une dernière fois « personne ne peut m’aider … ? »
Non, personne. Parce que je suis seul.
Solitude.