Les canadiens reviennent après un long hiatus sans n’avoir rien perdu de leur superbe. Ce retour providentiel, à l’instar de celui de Tortoise l’année passée, en ces temps de disette est des plus réussis.
Difficile de se réjouir pour un album de post-rock me direz-vous et c’est pourtant là tout le charme du genre : la quiétude et la reflexion qu’elle induit, l’apaisement et l’intelligence de compositions complexes, qui s’étirent lentement pour nous sortir de notre torpeur, nous réveiller en douceur alors que les images défilent dans notre tête et qu’on finisse par contempler ne serait-ce l’espace d’un instant la profondeur de l’univers.
L’album s’ouvre sur une séquence de batterie progressive et annonce la couleur, le retour s’annonce fracassant, l’énergie est immédiatement palpable. Cet album a tout du grower, on pourrait passer à côté lors des premières écoutes, si l’on y prête attention. Toutefois la plupart des morceaux sont suffisamment longs pour laisser les différents instruments s’installer, se répondre, les riffs se répéter pour faire leur effet, se laisser emmener par une section rythmique savamment distillée, jusqu’à ce que ces plages dénudées deviennent à la fois, jouissives, intrigantes, mystérieuses et familières.
Il faudra naturellement plusieurs écoutes pour digérer toute la richesse que recèle cette invitation au voyage au pays des étoiles noires. Pour notre part, il nous semble évident après quelques écoutes qu’on tient là un très bon cru. Pas besoin d’être meilleur sommelier de France pour apprécier le travail de composition réalisé et la production impeccable. Les fans du genre apprécieront.
L’écoute du diptyque central Bound/And Boundless à un volume suffisamment élevé vous projettera en apesanteur. L’incontournable Thomas Pesquet aurait sans nulle doute apprécié de pouvoir écouter cette claque sonore, en flottant les pieds dans le vide à 400kms au dessus de nos têtes. Mais déjà l’alarme retentit et le danger guette, l’atmosphère se fait plus pesante dans la seconde partie. Il vaudrait mieux rentrer.
Fausse alerte, les choses reviennent au calme et les petits oiseaux chantent sur l’intro du très entêtant As Far as the Eye Can See. Le retour sur terre, la tête à l’envers, devant des paysages qui défilent à vive allure, se passe pourtant sans encombre.
L’album se termine comme il a commencé avec grandiloquence avec un ensemble cuivres qui donne du corps et de la majesté à ce rêve éveillé. Return, Return Again, pas de souci, on compte bien revenir passer du bon temps dans l’univers des musiciens de Toronto, tant cette heure passée en leur compagnie ne saurait suffire à combler nos envies d’ailleurs.