(Critique publiée en 2016 mais SC bug)
Je reconnais un talent de marketing musical assez irréprochable : tout est pensé pour plaire à des habitués. La production est léchée, ça sonne très actuel, et même si j'aurais aimé que la répétitivité des compositions soit mise au service d'une certaine énigme (que pouvaient rendre certains motifs musicaux), non au service d'une attitude mimée sans intuition créatrice, je reconnais que les sonorités sont à peu près agréables. Oui, agréables, malgré la prétention puante qui s'en dégage et l'absence de sens ou de propos musical pertinent à mes oreilles. Le problème c'est le choix ou plutôt l'agencement de ces sonorités.
En fait, au-delà de son aspect commercial, ce Andy Stott collection de printemps 2016 est pour moi fondamentalement insipide, et formellement il n'a aucune audace, c'est un album de chiffe-molles, du commercial pour connaisseurs, c'est-à-dire rien de plus que de la séduction pour mélomane boulimique basée sur des reproductions matérialistes de degré zéro.
Les effets en musique c'est un peu comme le crayon en dessin, il ne suffit pas d'en avoir un pour se prétendre dessinateur ; par exemple c'est fou comme des choses parfois sensées en vaporwave ou ambient (au hasard ces vieilles descentes chromatiques sur Over) deviennent inintéressantes quand on les emploie sans réfléchir concrètement à ce qu'on crée : du second degré intelligemment employé, on passe très vite à un premier degré creux et inefficace. Bref, est-ce qu'il suffit de se donner le "mal" de recycler quelques poncifs de l'electronica bourgeoise appréciée des hipsters, en agrémentant le tout de quelques artifices de prod et d'effets par-ci par-là, pour créer quelque chose d'intéressant ? Qu'est-ce qui a été créé sur cet album, au juste ? Rien. S'employer à réutiliser les aspects les plus superficiels de la grâce ne suffit pas à y prétendre... et pourtant, Too Many Voices prétend, de la pochette aux fictions sonores proposées, il prétend beaucoup.
Le problème globalement, c'est que pour des raisons de contexte, ce genre de production sera mise en avant par la communauté mélomane qui en a une habitude suffisante pour être convaincue que ça, c'est de la bonne musique. L'éveil esthétique doit être consubstantiel à un certain éveil spirituel. J'en veux pas du tout à mes éclaireurs d'aimer ça, sincèrement, ça se comprend complètement et c'est toujours possible de céder à la séduction d'un album étiqueté en fonction de nos appétences (après tout j'aimais bien Weird Little Boy à un moment, et une voix féminine qui déraille me fera toujours de l'effet), mais ça doit se faire en conscience.
Bonus avec la liste de BitchAssDarius sur l'EDM prétentieuse : http://www.senscritique.com/liste/edm_pretentieuse/1311925