Yesterday Tomorrow and in Between par dylanesque

En 1998, Simon Joyner propose un double album et 80 minutes de spleen. Ne vous fiez pas à l'ouverture exaltée "Bring Down Goliath", le tempo reste par la suite bloqué en mode valse mélancolique. Ambiance dernière tournée au saloon où le cow-boy du Nebraska invoque fantômes et démons, où l'apôtre désabusé déclame de longs poèmes dans le vide. Cymbales et cordes sont effleurées et accompagnent un numéro d'équilibriste où jamais ce long récit d'ennui est ennuyeux. Accoudée au comptoir, le vieux Johnny Cash essuie une larme à l'écoute de "Morning Is Weary" tandis que le jeune Connor Oberst prend des notes. Athées comme religieux s'agenouillent quand résonne les accords bénies d'"Amen".


Face à un double album, on a souvent des envies d'élagage. Ici, rien n'est à jeter. Dès qu'on touche le fond et que la noirceur devient irrespirable ("That Was You"), une douce lumière nous redonne la force de poursuivre l'écoute ("Christine"). Dès que le pianiste va pisser, le guitariste récupère sa place et concurrence les cris d'un canari ("Came A Yellow Bird"). Pendant la conclusion de onze minutes, des noix de cocos sont entrechoqués pour imiter les sabots d'un cheval ("The Passenger"). Que vous faut-il de plus ?


Minimaliste sans être lo-fi, vulnérable mais jamais larmoyant, ambitieux sans être grandiloquent, Simon Joyner livre son oeuvre la plus riche et cohérente. Un monument de folk sudiste gothique. Près de vingt ans après sa sortie confidentielle, il n'est pas trop tard pour le revisiter. Un morceau comme "Eight Verses" devrait suffire à la postérité.


"Nothing yet from nothing ever came
We bury our answers six feet beneath our questions"

dylanesque
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le 29 mars 2018

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