Une des principales caractéristiques et donc une des principales qualités de Procol Harum est de savoir créer des chansons absolument épiques, qui les rendent presque instantanément mémorables. La montée en puissance du refrain de "Homburg" conclue par le magnifique "Your overcoat is too long" avec la petite emphase sur le "long" en est un magnifique exemple, de même lorsque Brooker crie avec toute sa puissance "So it was later" sur "A Whiter Shade of Pale", de même lors du final de "In Held 'Twas In I". Bref, c'est cet esprit, avec en plus le style classique du groupe que l'on s'attend à trouver sur ce troisième album.
Et lorsqu'on le commence, c'est en effet EXACTEMENT ce qu'on trouve, avec "A Salty Dog". Il semble que Brooker ait enfin sauté de la pas de l'orchestration classique pour soutenir ce qui est surement devenu la meilleure chanson du groupe. La douceur marine des couplets et le refrain passionné sont à couper le souffle, sublimant par la même occasion les paroles de Keith Reid, sans oublier les passages instrumentaux plutôt contemplatifs qui sont juste magnifiques.
Et puis lorsqu'on continue l'album, c'est EXACTEMENT ce que l'on ne trouve PAS. Ce qui peut à la fois se comprendre comme un reproche et comme un compliment, vu que le groupe explore quelques nouveaux genres et diversifie son style. La mélodie de "The Milk Of Human Kindness" est tout sauf puissante, même si parfaitement sympathique. Et lorsque j'écoute "Too Much Between Us" ou "Boredom", je dois avouer que j'ai du mal à reconnaitre là un album de Procol Harum, "Too Much" est cependant très belle dans son minimalisme et "Boredom" plutôt amusante, donc il n'y a finalement pas tellement de problème. Par contre ceux qui s'attendent à trouver des chansons de la hauteur d'un "A Salty Dog" seront peut-être assez déçu. Mais il y a quand même de quoi faire, hors d'un "Juicy John Pink" on ne peut moins original, "Wreck Of The Hesperus" et "All This And More" par exemple renouent avec une certaine ambition, malgré une performance vocale plutôt bancale dans le premier.
A Salty Dog reste un excellent album, mais qui me laisse une impression un peu plus dissipée que les deux précédents.