Pas facile de se dépatouiller sans son leader, à plus forte raison quand l'effacement de ce dernier intervient en quelques mois. Barrett devenant de plus en plus amorphe, c'est Roger Waters et Richard Wright qui prennent la responsabilité de la composition et de l'écriture de ce second opus tandis qu'un nouveau venu, Gilmour, se contente d'épauler Syd à la guitare et à pousser un peu la chansonnette... Tout est assez décousu, on sent bien que le groupe cherche à se renouveler, quitte à abandonner les strates du psychédélisme. On a ainsi, en vrac, les incantations spatiales de Waters ( les sympathiques mais répétitifs « Let there be more light » et « Set the controls for the heart of the sun »), les mélodies nostalgiques de Wright (le moyen « See-Saw » et l'excellent « Remember a day ») et la chanson d'adieu de Barrett avec le déjanté « Jugband Blues » qui termine brillamment un album commencé par Waters... L'ancien et le nouveau leader aux extrémités, la boucle est bouclée.
Des compositions assez plates dans l'ensemble, précurseurs de la direction « planante » que prendra le groupe, mais sans le brio affiché plus tard. Deux gros coups de coeur toutefois: « Remember a day » pour ses paroles magistrales, poésie de l'enfance qui m'a touché en plein coeur, et « Jugband Blues » pour une composition qui part cette fois complètement en sucette mais paradoxalement soutenue par des paroles aussi lucides qu'amères. J'aime notamment beaucoup l'idée de Syd d'avoir fait intervenir de façon improvisée des musiciens de l'Armée du Salut ! Le genre d'ouverture d'esprit aux possibilités offertes par l'instant qui me parle...
Enfin, à noter la chanson-titre, première tentative de musique-concept du groupe, structurée comme une mini-symphonie, très riche mais un peu bridée malgré une longueur très honorable... Un album décidément moins intéressant pris dans sa globalité que dans la succession de ses particularités. Presque un appel à l'aide face à un futur qui s'annonce bien sombre...