Nous sommes en 1983, à Londres, lorsque Dire Straits fait enregistrer ce live. À cette date, le groupe est au sommet de sa carrière, quelques mois avant leur mégacarton Brothers in Arms.
Et il faut dire que effervescence créatrice du prochain album se retrouve dans ce live, en particulier dans les chansons qui sont complètement étalées (Once Upon a Time in the West, Sultans of Swing ou Tunnel of Love qui dépassent aisément les 10 minutes), remplies par des impros d'une riche variétés, frôlant quelques délires jazz, marchant pleinement sur la corde progressive. Des chansons qui durent et qui gardent leur prestance tout du long, ce qui est assez ironique quand on sait que Dire Straits a la fâcheuse tendance à faire des morceaux trop longs, en faisant tourner en boucle quelques riffs jusqu'à un fade-out qui met toujours du temps à venir, quitte à -osons-le- parler de remplissage. On dirait bien que ce live leur a permis de faire de "vraies" chansons longues (spoiler : ils auront oublié dès Brothers in Arms).
Le seul problème de ce live, c'est son enregistrement, et la prod qui a choisit de laisser une part très (trop) importante au public. Qu'on ne s'y méprenne pas, le public, il est fort sympathique : il chante, il frappe des mains, il s'émerveille quand il reconnaît la chanson. Mais il s'émerveille un peu trop souvent, surtout durant des chansons longues, car toute surprise pour l'auditeur est couverte par un amas de cris. Surtout pour Private Investigations, dont la froideur de la version studio perd de son sens ici...
Dans le choix des chansons, l'ensemble se veut éclectique. Alors bien sûr les deux derniers albums sont mis à l'honneur (Making Movies, Lover Over Gold), mais Once Upon a Time in the West et Sultans of Swing provenant des albums antérieurs s'ajoutent à la liste. Two Young Lovers, présent sur l'EP ExtendedancEPlay (difficile à trouver, ce qu';on peut voir par le public ne semblant pas connaître la chanson) et Going Home, venant de l'album solo de Mark Knopfler.
Mark Knopfler parlons-en, est sans aucun doute le leader du groupe : l'unique compositeur, l'unique parolier, chanteur et guitariste (d'un certain talent), il a tendance à prendre un peu le premier plan sur tous les autres membres. Mais pour ce live, même s'il se met souvent en vedette par son rôle de guitariste et chanteur (où il parvient à livrer un supermégasolo de malade sur Sultans of Swing), il laisse la place de temps en temps à d'autres, en particulier pour Alan Clark, le claviériste qui a su s'imposer au fur et à mesure dans des compositions le mettant en avant, et par un jeu remarquablement impressionnant (Telegraph Road ♥). Tout ensemble, ils arrivent à se compléter, de temps en temps chacun se plaçant en avant, mais toujours dans une ensemble cohérent.
Le résultat donne un concert énergique, (notamment sur Sultans of Swing), inattendu par la réécriture de leur nombreux tubes. Parfois simplement allongés, avec un charme planant (Once Upon a Time in the West), parfois avec des changements drastiques (Tunnel of Love dont l'intro de 4 minutes prend une tournure entre le romantique et le magistral). Chaque musicien a son importance reprend de temps à autres le devant de la scène, pour compléter une composition riche et dynamique, formant une sorte d'alchimie.