Si l'on analyse "American Stars 'n Bars" avec un minimum d'objectivité, il s'agit sans aucun doute du premier disque "moyen" de Neil Young depuis son discutable premier album éponyme de 1968. Entre les deux, nous avons eu droit à une suite ininterrompue de chefs d'oeuvre et de grands disques, des plus plaisants au plus malaisants, grâce auxquels le Loner a posé les bases de son oeuvre. Il fallait bien que ça s'arrête un jour, et, d'une certaine manière, "American Stars 'n Bars" annonce clairement le chaos à venir au cours de la décade suivante.


Mais, pour nous qui l'avons acheté le jour de sa sortie en 1977, et qui l'avons écouté avec la même foi que ses prédécesseurs, il s'agit d'un album que nous aimons "malgré tout", ne serait-ce que grâce à la présence sur sa seconde face de "Like a Hurricane", l'une des meilleures chansons de la carrière de Neil, livrée ici dans une version d'une tristesse déchirante, surpassant même celle du déjà magnifique "Cortez the Killer" de "Zuma". Le fait que cet immense morceau deviendrait les décennies suivantes l'une des tueries électriques les plus fabuleuses de Crazy Horse sur scène ne nous empêche pas de toujours préférer cette version "originale", moins emportée, mais merveilleusement humaine.


"American Stars 'n Bars" est en fait, et à l'image de sa pochette délirante (due au copain acteur - intense - Dean Stockwell !) un incroyable - et assez amusant, il faut bien le reconnaître - foutoir, composé de morceaux enregistrés avec des musiciens différents sur une période de près de 3 ans ! Nei Young, en pleine confusion, vient de tuer deux de ses projets d'album quasi-aboutis, "Homegrown" et "Chrome Dreams", et il a sur les bras une pléthore de bon matériel dont il peut se servir. Il récupère donc ici quatre chansons jouées avec Crazy Horse entre 1974 et 1977 (enfin, il est difficile de qualifier la version acoustique solo de l'étonnant, et très "rêveur" "Will To Love" de morceau de Crazy Hose, mais c'est ce que Neil fait sur la pochette !), et il y ajoute cinq titres - la première face de l'album -, enregistrés pour l'occasion et beaucoup plus "country traditionnelle", où les musiciens de Crazy Horse bénéficient (?) du renfort de l'incontournable Ben Keith à la pedal steel guitar, et de choristes "de luxe" telles que Linda Rondstadt et Nicolette Larson.


Le résultat est un disque schizophrène, avec une première face que l'on peut qualifier de "plaisante" pour peu qu'on aime au moins modérément la country (ce qui n'est pas forcément le cas de tout le monde !), et une seconde qui montre surtout ce qu'un véritable nouvel album de Neil Young & Crazy Horse aurait pu être.


En 1977, nous acceptâmes donc ce disque sans trop y voir de problème, mais les années chaotiques suivantes - avec des hauts très hauts ("Rust Never Sleeps") et des bas très bas ("Everybody's Rockin") - nous prouvèrent a posteriori que notre diagnostic aurait dû être différent !


[Critique écrite en 2020]

EricDebarnot
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le 11 juin 2020

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Eric BBYoda

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