Milk & Honey
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De Rod Modell et Stephen Hitchell je ne connaissais qu'un album, Liumin, sorti sous le pseudonyme DeepChord presents Echospace, massif road trip urbain dans une civilisation sous-marine, une dub techno qui colle au corps, dont l'urgence est reléguée à un arrière plan toujours en mouvement, une artère dont les flux sont soutenus mais troubles, lointains, tandis qu'au plus près de nos oreilles c'est une formidable mixture composite, aquatique, organique qui véritablement nous happe - rarement, dans quelque disque que ce soit, tous genres confondus, aurai-je été à ce point instantanément transporté dans un univers (le terme est râbaché, mais ici il se justifie par la richesse et la cohérence évocatrice de son écosystème sonore). Eh bien, quelques temps plus tard voici que cet analogue oceans paraît, que les mêmes types sont derrière les manettes et qu'ils ont passé des années... à faire tout le temps la même chose, à quelques variations près.
Mais je ne suis pas homme à m'offusquer pour si peu, les deux gus (surtout Rod Modell de ce que j'en comprends, prince des atmosphères électroniques aquatiques) semblent avoir très précisément trouvé ce dans quoi ils excellent et continuent à exploiter un filon semble-t-il inépuisable, je ne vais pas leur demander de se mettre à la country pour voir s'ils s'y trouvent quelque talent caché. D'autant que, de toute évidence à l'écoute de cet album non moins massif que son grand frère, ils ne se contentent pas de demeurer en eaux stagnantes et renouvellent patiemment leurs courants marins, en allongeant le cours et en élargissant le lit. Les cv313 travaillent sur de longs formats - de 18 à 30 minutes par pistes environ, avec l'une des 5 qui s'étend sur toute une heure. Et si l'atmosphère est tout aussi riche et instantanément parlante que celle de Liumin, les pistes ici prennent davantage le temps de développer leur abstraite narration, de manière à faire doucement monter la sauce à coups de plages éthérées sur lesquelles s'échouent des vagues électroniques en crépitements évanescents, et de beats sourds en infra basses (c'est pas de la "dub" techno pour rien, c'est un peu comme si nos voisins du centre de la Terre faisaient la teuf et qu'on en entendait les échos par pulsations dans l'océan à travers la croûte terrestre).
Si l'on s'amuse à calculer la durée totale d'analogue oceans on arrive à un peu plus de 2h30 de musique. C'est beaucoup oui, sur le papier, mais lorsqu'on passe ce temps en pareille compagnie, ledit temps prend une toute autre pesanteur, on flotte et toute notion de "durée" prend des doux airs d'anecdote. Il y a bien une dernière chose ; l'éléphant onirique dans le couloir d'éther, cette piste homérique de 62 minutes qui s'éloigne des structures technoïdes pour s'en aller vers l'ambient quasi pur-jus, en laissant en veilleuse le pulsatif pour mieux détailler un environnement sonore qui ne cesse jamais de se transformer, lentement mais sûrement, véritable barrière de corail qui vit avec sa faune et sa flore. C'est aussi cela qui consacre analogue oceans : pour tout amoureux que je suis de Liumin, sa deuxième moitié ambient a toujours peiné à me convaincre autant que sa contrepartie techno, et cela crée un certain déséquilibre dans l'écoute (comprendre : j'arrête souvent après le premier disque). Ici en revanche, Modell et Hitchell prouvent qu'eux aussi n'ont pas cessé d'évoluer dans leur domaine, que les impressions de "toujours pareil" ne sont que cela, des impressions, vagues et proférées à la va-vite tandis qu'eux survolent le dub techno game en étant, cette fois, aussi compétent en chaque facette de leur art.
Chronique provenant de XSilence
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes 2018 en musique après la cuite fortuite où j'ai pris la fuite devant un inuit et sa truite gratuite et Les meilleurs albums de 2018
Créée
le 30 juil. 2018
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