C'est l'histoire d'un mec plus doué que la moyenne et en avance sur son temps.
Gilles aka Joke sort son premier album sur Institubes, label plutôt branché musique électronique, en 2009. Chaperonné par Teki Latex (ça ne s'invente pas), il balançait alors un rap "égo-trip" sur des prods assez originales ("Je Ne Suis Pas Un Rappeur" titre évocateur ; "The Sixpack Anthem Remix"). Dès la première écoute, j'ai halluciné : mais c'est qui ce gars ?! Ce style était complètement nouveau, du moins je ne l'avais jamais entendu. Il faisait office d'ovni dans le rap français. Il était en avance, et de loin.
Il enchaine avec PPA 1.5, projet en téléchargement libre. Deuxième claque ! Il en remet une couche et hausse le niveau. Si vous ne connaissez pas, allez écouter sur YT : ᐂ, Batmobile (avec Action Bronson, encore en avance), Schumacher... Que des tueries.
Puis plus trop de nouvelles, il avait un peu disparu des écrans radars. Jusqu'à l'annonce de la sortie de 2 EPs : Kyoto et Tokyo. Ces 2 projets sont pour moi dans la continuité de ce qu'il faisait auparavant : de l'égo-trip très bien écrit sur des instrus hyper originales et d'encore meilleure qualité et variété. Ils ont connu un certain succès, ce qui lui a permis d'élargir son public. "Tant mieux pour lui, me disais-je. S'il fait du bon son et qu'il plait à de plus en plus de personnes, c'est tout bénéf pour lui". Quelle naïveté...
Entre temps, Joke signe chez Def Jam pour son album. Et là, tout se complique. Quelques singles paraissent avant l'album : Sphinx, Miley, Majeur En L'Air. Mais que s'est-il passé ? Qui a séquestré le vrai Joke ? Des prods "trap" qu'on peut entendre partout, un flow horrible, des paroles bidons. Notons d'ailleurs qu'il s'est senti une soudaine rancoeur envers la France et Marianne, why not (sûrement pour plaire aux mecs du ghetto). Malgré ces grosses déceptions j'attendais la sortie de l'album.
Et donc le voilà, Ateyaba. Je clique sur play et démarre "Pharaon" : putain, ça commence mal. Malheureusement, ça restera du même acabit tout le long de l'album. Malgré certaines prods assez lourdes ("On Est Sur Les Nerfs", "Casino", "Black Card"), le reste est très mauvais, voire dégueulasse ("Miley", "Pharaon", "Sphinx"). Au niveau des paroles, on retrouve parfois un Joke "à l'ancienne" mais c'est plus le même niveau. On sent l'album programmé par une maison de disque, c'est pas du tout travaillé.
Joke a complètement changé de style de rap et ce nouveau ne me plait pas du tout, ce qui, je pense, est partagé par une grande partie de son "public originel" (vous remarquerez les guillemets). Joke plait aux masses, Joke passe à la radio, Joke fait de la soupe.
Néanmoins, on lui doit une chose, sa cohérence depuis le début : il n'a jamais été aussi prêt pour l'argent. Au détriment du côté artistique ? A vous de juger.