Un 20éme album tout en subtilité!

"Grand squelette de phosphore, la terre tremble sur le port..." Bienvenue en Haïti!
C'est bien cette île qui a inspiré le fil conducteur de l'album avec son "Baron samedi", figure majeure du culte vaudou à la fois patron des cimetières et des excès sexuels, représenté traditionnellement par un squelette railleur coiffé d'un haut de forme et revêtu d'un smoking noir.
On raconte que ce serait lui, qui en moins d'une minute, aurait réduit à néant la capitale, Port au Prince... Voilà pourquoi, Bernard Lavilliers de retour dans l'île 3 ans après la catastrophe, a eu envie de poser la question "Que peut l'art face à la misère noire..." dans la chanson "Tête chargée" tout en rendant hommage à l'énergie des haïtiens qui continuent à lutter quotidiennement pour "Vivre encore".
Au détour de l'album, on croise des personnages singuliers... un monte en l'air qui prétend avoir du "Vague à l'âme", un émule de "Jack" l'éventreur bien décidé à en découdre avec les banquiers de la city sur une mélodie suave qui s'insinue dans les neurones comme un poison subtil.
Grand voyageur devant l'éternel, il nous balade ainsi des States avec " Y'a pas qu'à New York" -en forme de clin d'œil au poème de Blaise Cendrars "Pâques à New York"- jusqu'à l'océan indien grâce à une version revisitée d'un standard réunionnais d'Alain Peters "Rest la maloya".
Contrairement à son habitude, il n'hésite pas à verser dans le registre de l'intime avec "Sans fleur ni couronne" dédiée à sa mère disparue, sur une mélodie légère qui adoucit le propos.
"Villa Noailles" quant à elle, évoque avec nostalgie, l'ambiance des années folles et les artistes qui faisaient escale dans ce bijou d'architecture avant-gardiste qui domine la baie de Hyères.
Il a également voulu se faire plaisir en mettant la poésie à l'honneur. Qu'elle soit de Nazim Hikmet, poète turc du 20éme siècle avec une adaptation nerveuse du poème "Scorpion" ou encore cette étonnante lecture de la "Prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France" de Blaise Cendrars de plus de 26 minutes qui constitue le second opus de ce double album, sur une mélodie tantôt jazzy tantôt funk qui lui apporte un petit supplément d'âme qui lui manquait!
Vous l'aurez compris, cet album atypique et intimiste a su me séduire même s'il est très loin du rock des années 70/80 et à mon sens parmi les meilleurs de sa longue carrière!
Primavera
10
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le 5 févr. 2014

Modifiée

le 5 févr. 2014

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