Ma maman, d'habitude, je lui fais confiance, niveau musique. Quand elle m'a mis ce CD dans les pognes, j'ai vu ses yeux se remplir d'étoiles, comme si elle avait renoué avec le meilleur des années 60/70 et sa jeunesse enfuie. Je ne l'avais plus vu dans cet état depuis... Ouh ! Dieu sait quand. C'est dire si ça avait l'air génial.
Elle m'a dit que c'était trop bien et que je devais écouter ça toutes affaires cessantes.
Et moi, bein, je l'écoute, ma maman. Parce que sinon, c'est un coup de pied aux fesses et un coup de rouleau à pâtisserie sur le coin du masque. Je mets donc son bon conseil en pratique. J'enfourne le CD dans ma platine et m'installe dans mon fauteuil moelleux, la sensation agréable et à nulle autre pareille d'un mug de chocolat chaud entre mes mains. Les meilleures conditions possibles pour savourer l'écoute, au calme, loin de tout, dans ma bulle aux douces effluves de cacao.
Le chocolat chaud descend dans ma gorge tel le Petit Jesus en culotte de velours. Il n'en a pas été de même, malheureusement, dans mes oreilles, pour les douze titres de ce Bed of Stone. Mal nommé d'ailleurs, cet album. Car ce lit de pierre(s) dans lequel, pour moi, se lovent habituellement les petits torrents ou les rivières qui chantent aurait dû être animé d'un courant irrégulier, d'un rythme heurté aux aspérités auxquelles j'aurais pu m'accrocher, d'une douce mélodie aquatique.
Au lieu de cela, je me suis donc retrouvé assis sur un lit de pierre froid et sans passion.
La première écoute s'avère extrêmement décevante tant j'ai peine à me souvenir d'un morceau, d'un quelconque phrasé, même d'un refrain. Je me dis que je suis passé totalement à côté de l'oeuvre et la relance donc sur ma platine.
Je me surprends, après huit minutes, à m'inquiéter de la longueur de ce que je pensais être une chanson... J'entamais la quatrième de rang. Et je cerne tout d'un coup le problème : toutes les plages sont calquées sur une impression similaire de rythme mou, indistinct et informe que la pourtant jolie voix d'Asa échoue à dynamiser ou à rendre intéressante, ou seulement à secouer de temps à autre son auditeur. Informe, c'est le mot.
Presque toutes les chansons passent ainsi dans les esgourdes sur le mode identique et peu marqué du montage à la chaîne, sans manifestation d'une grande passion, sans doute dans le souci de ne pas réveiller celui dont la conscience aurait finalement sombré dans les bras de Morphée.
Seules Eyo et Situation arrivent finalement à se détacher, au prix d'une troisième écoute qui sera pour moi la dernière. Elles ressemblent à des greffes d'un autre univers, enfin doté d'une atmosphère, d'une aspérité, d'un rythme plus alerte et d'un semblant de refrain qui reste dans la tête. Mais quand même, deux chansons sur douze, vu le prix du support physique de nos jours ou d'une chanson en téléchargement, ça attriste et ça fait mal.
J'avoue que quand j'ai rendu le CD à maman, je ne lui ai pas dit ce que je pensais réellement. Pas pour la ménager, hein. C'est parce qu'elle avait le rouleau à pâtisserie à la main et une poêle dans l'autre. On ne sait jamais ce qui peut s'abattre sur notre pauvre tête, vous savez... Ah ! Je vous l'avais pas dit ? Maman, elle aussi, elle a tourné dans un slasher. Ca s'appelait Cauchemar en Cuisine, ou un truc comme ça, je sais plus. Mais j'peux quand même vous dire que c'était trop effrayant.
Behind_the_Mask, qui a planqué les couteaux de cuisine (c'est plus sûr).