Du remplissage
Avec cet album je trouve le duo épuisé. Là où les derniers disques étaient de nouvelles itérations de leur folie créatrice, ici ils s'auto-caricaturent et les morceaux ne sont pas aussi mémorables...
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le 17 oct. 2021
"Big Beat" ou l'art de couler un disque, et sa carrière du même coup…
... Car en 1976, alors que le monde semble prêt à sacraliser définitivement Sparks après trois albums magnifiques, les Frères Mael décident, les ingrats, de quitter Londres qui les a si chaudement accueillis pour retourner aux Etats-Unis. Et pour des raisons que je n'ai encore vu expliquées nulle part, de sortir un album de "gros rock qui tache", enregistré à New York alors que, à quelques centaines de mètres de là, la disco explose dans les clubs et le punk rock est en train de naître : le résultat est ce "Big Beat", l'un des albums les plus laids de toute leur longue discographie (qui plus est enveloppé dans une pochette photographiée par le renommé Richard Avedon, tout aussi décalée par rapport à "l'essence" de Sparks), que le passage du temps a encore rendu plus inécoutable. A sa sortie, "Big Beat" sera unanimement ignoré par la critique comme par le public, ce qui replonge les Frères Mael pour très longtemps dans l'anonymat...
Il faut admettre que beaucoup de choses, ici, sont absolument "embarrassantes" : la production est stupide, façon gros rock américain, manquant totalement de finesse et de pertinence à une époque où la légèreté punk va envahir le monde de la musique ; Ron semble avoir, lui qui douze mois plus tôt, semblait capable d'inventer sans effort mélodie sublime sur mélodie sublime, complétement perdu le "knack", et ne fait que ressasser en moins bien des idées déjà entendues et bien mieux développées. Pire peut-être que ces musiques mornes, "Big Beat" souffre de quelques étonnants dérapages de l'humour "maelien" : il est difficile de pardonner les paroles d'un "White Women", dont le second degré (?) manque cruellement sa cible. Le sommet de l'horreur est néanmoins atteint par un "Fill-er-Up" quasi-rockabilly (une erreur que le Sparks ne répétera heureusement jamais, à notre connaissance), ou par les effets de pathos presque obscènes (par rapport à la classe naturelle de Ron et Russell) du final du décidément insauvable "White Women", avant que les cuivres pitoyables d'une mauvaise chanson rescapée de l'époque Halfnelson, "I Like Girls" enfoncent totalement l'album dans la catégorie des navets.
On ne sauvera de "Big Beat" qu'un "Confusion", destiné à l'origine à un projet de film de Jacques Tati qui ne verra jamais le jour du fait du décès du maître, et qui vous trottera dans la tête pendant longtemps. C'est vraiment très peu.
[Critique écrite en 2020, à partir d'une première version de 2009]
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Quand la pop fait des étincelles... Revisite de la discographie de Sparks
Créée
le 7 déc. 2014
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