Voilà que je me disais justement que le goût s'éduque en toutes matières ; qu'un amateur de vin apprends son sujet, à détecter les arômes, à comprendre son palais, à comprendre son produit, comme peut le faire un amateur de musique qui, en développant ses sens et ses habitudes, s'éloigne de produits dont les attraits et atouts dissimulent une pauvreté qui est trop fréquente, et qui est de moins en moins attaquée.
Qu'il est facile aujourd'hui de défendre la culture pop en enjolivant sa pauvreté, en reconnaissant son importance ; et qu'il est facile d'oublier que tous les goûts ne se valent pas, qu'il existe un bon goût et par-dessus tout que les goûts et couleurs se discutent. On ne discute même que de ça.
Callus tombait à point au milieu de mes tergiversations : une musique torturée, riche, complexe, profonde, difficile d'accès, et surtout absolument géniale. On s'éloigne de la quasi gentillesse de A Sufi And A killer, on passe au second plan (encore que...) la curieuse mélancolie d'autrefois, et on admet, on embrasse pleinement le côté sombre que pouvait porter, receler la musique de Gonjasufi.
J'aime Gonjasufi. Peut-être même trop. Au point de bouffer les albums, de les user, de les écouter jusqu'à la nausée puis de les oublier pendant des années à trop les avoir entendus ; puis de retomber dans le génie du groupe à chaque rechute.
C'est une musique étrange, difficile à définir, que l'on pourrait rattacher au hip hop et à l'électro mais qui puise une grande partie de son inspiration dans le rock, la soul,... avec une voix dont le le timbre et les intonations ne correspondent à rien dans les genres précités.
Ce n'est pas inaccessible, c'est simplement un son rare, des mélodies peu courantes, et donc quelque chose à découvrir, ne serais-ce que par curiosité.
Par-dessus tout, c'est une musique riche, nourrissante, qui permettra à votre ouïe de s'affiner, d'apprendre, de s'enrichir.