Rappelons en guise d'entrée toute l'admiration que j'ai pour Bob.
Robert l'acteur, bien sûr, mais aussi Mitchum l'être humain, drôle, incisif, capable d'un recul dévastateur sur son activité ou sur ses contemporains, aidé en cela par une consommation relativement intense de ces choses qui rendent la vie un peu moins poisseuse : alcool et autres drogues douces qui lui ont valu, en son temps, son lot de désagréments judiciaires.
Aujourd'hui, les amis, nous parlerons de Mitch le chanteur.
Parce qu'il y a à dire, et pas qu'un peu !

L'histoire

On la connait : nous sommes en 1956, Bob partage avec Jack Lemmon et Rita Hayworth l'affiche de « l'enfer des tropiques ». Le tournage se situe au cœur des caraïbes, sur l'île de Trinidad. Jack raconte mieux que quiconque ce qui sera à l'origine de ce disque mythique (pour une fois, le terme a longtemps été on ne peut plus juste) : « Nous écoutions ces mecs qui depuis la nuit des temps gagnaient leur vie en passant de table en table, improvisant des paroles sur du calypso. Quand tout à coup, ce fils de pute de Mitchum se lève et commence à inventer des paroles avec eux. Ca a duré une vingtaine de minutes, il allait d'une table à l'autre, exactement comme les pros, inventant des paroles exceptionnelles. Je n'en croyais pas mes yeux, il était aussi bon qu'eux ! »
Deborah Kerr, sa compagne de l'époque le confirme : durant les mois qui suivirent, à Trinidad, Bob développe cet autre don inné chez lui, un sens du rythme et de la musique à rendre fous de jalousie les péquins moyens qu'une majorité d'entre nous sommes.
On doit faire un bond de quelques mois et un retour aux States pour poursuivre l'histoire : un ponte de Capitol records demande à Bob ce que ce dernier sait faire : Mitch danse quelques pas et fredonne quelques phrases de Caplypso. Le contrat est signé et l'enregistrement peut débuter. Nous sommes en 57.

La légende

Au début des années 90, « Calypso is like so » est un des graals de l'amateur de musique éclairé et du disquaire concerné : le disque n'est plus distribué depuis belle lurette et ceux qui en parlent ont soudain l'œil qui s'illumine et le sourire complice de ceux qui savent. Le posséder, le connaitre, fait de vous un être à part. Vous faites partie des élus. Certes, Mitchum a enregistré un album country dans les années 60 et est connu pour ça, mais il n'empêche : c'est le Calypso le vrai truc.
L'obtenir en import est on en peut plus ardu : régulièrement introuvable, il arrive parfois au compte-goutte anémique, et à un prix qui décourage tout non-cadre supérieur.
Les enfants, je précise : je vous parle d'un temps où internet est encore balbutiant, et où le terme de MP3 ne peut rien évoquer d'autre qu'un composé chimique ou médical. Les cassettes voilées (ndla : objet rectangulaire troué deux fois permettant le défilement d'une « bande magnétique» où pouvait se fixer des éléments sonores) se passaient de mains en mains. Mais sans la pochette, ça le faisait sacrément moins.

Le disque

Ressorti officiellement par EMI en 95, Calypso is like So est désormais un best seller intemporel qui connait de régulier beaux jours quand les opérations de CD-pas-chers garnissent les derniers rayons disques de la planète.
Aujourd'hui, que reste-t-il de ce disque atypique ? Convenons-en illico : le calypso n'est pas ma tasse de whisky et si Bob ne s'y était pas aventuré, il y a peu de chances que je vous en parle aujourd'hui.
Pourtant, son écoute est indispensable. Les musiciens qui accompagnent Bob sont parfaits, les arrangements sont authentiques (loin de toutes les daubes préfabriquées que –déjà !-les gloires du grand écran enregistraient en ces temps pas si reculés) et il faut entendre (oui, il faut !) Mitch avec son phrasé unique débiter des couplets improbables dont la drôlerie n'a d'égale que l'acuité.
Ainsi, si vous le faites le plaisir de découvrir ou (redécouvrir) cet album magnifique, vous saurez pourquoi d'un point de vue purement logique il vaut mieux se marier à une femme plus vieille que soi. Vous saurez ce qui est arrivé à Jean et Dinah. Ce qui est arrivé à cette génération. Pourquoi ce n'est « pas lui ». Et à quoi ressemble de l'eau de noix de coco.
Il se dégage de ces plages un charme à nul pareil, une bonne humeur durable, ce moment suspendu résonne dans vôtre âme devenue soudain légère avec des accents de grâce. On a soudain envie d'effectuer deux ou trois petits pas et fredonner avec Bob.
L'immense Bob.

Et grâce à ce disque, comme Robert le dit mieux que quiconque, je peux désormais m'exclamer : « I learn a merengue, mama » !
guyness
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les plus belles pochettes d'albums et Si tu ne devais écouter qu'un...

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le 28 déc. 2011

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guyness

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