Champagne Pour Tout le Monde, Caviar Pour Les Autres… sont sortis séparément à
quelques jours d’intervalle, mais s’apparentent en fait à un double album
(quelques éditions spéciales existent sous cette forme). Tout d’abord de par les
titres et les conceptions graphiques qui se répondent. Mais aussi par les
chansons qui se complètent, bien qu’enregistrées dans deux studios distincts, en
Louisiane et au Château d’Hérouville. Cet ensemble constitue en vérité une
superbe synthèse de ce qu’Higelin sait faire de mieux depuis le début de sa
carrière. On retrouve le côté expérimentateur loufoque et bricoleur de sons de
ses premiers albums, avec “Cayenne C’Est Fini” accompagné de cailloux et de
ferraille rouillée, ou “Dans Mon Aéroplane Blindé” et ses bruitages. Dans ce
dernier, l’écriture joue sur une mise en scène théâtrale, que l’on retrouve
aussi dans “L’Attentat À La Pudeur” où les différents personnages sont chantés
par des invités, et dans une moindre mesure dans “Champagne” où Jacques incarne
entre autres Lucifer. Dans “Ah La La Quelle Vie Qu’Cette Vie” Higelin interpelle
carrément ses musicien(ne)s, en y prenant un plaisir manifeste. La reprise “Hold
Tight (Sea Food)” rappelle d’où il vient, notamment du music hall et du jazz. De
belles ballades sont également enregistrées, la piano-voix alcoolisée “Vague À
L’Âme” et la guitare-voix de plein air “Je Ne Peux Plus Dire Je T’Aime”. Toutes
les chansons précitées ont été élaborées à Hérouville avec Laurent Thibault à la
réalisation. Pour tout le reste (sauf “Trois Tonnes De T.N.T.” à Hérouville), on
sent l’influence de l’enregistrement très professionnel en Louisiane avec des
musiques plutôt blues-rock voire soul, mais qui manquent de spontanéité.
Certaines chansons très rock reviennent sur la veine BBH75 avec des paroles
dures et violentes (“Avec La Rage En D’dans”, “Beau Beau Ou Laid” et “Trois
Tonnes De T.N.T.”). D’autres sont plus douces comme “Tête En L’Air”, mais pas
nécessairement légères comme en témoignent “Captain Bloody Samouraï” ou “Ci-Gît
Une Star”. En définitive, cette collection de chansons constitue la pièce
maîtresse d’Higelin, donc idéale pour une première approche de son œuvre et en
tout cas indispensable à toute discographie du rock français qui se respecte.