Cuir cuir moustache

Chromatica

Quand j’ai découvert Chromatica, j’ai eu du mal à accrocher. Après un Joanne dépouillé et introspectif, ce retour à une électro-pop surproduite, presque caricaturale, m’a semblé trop abrupt. C’est comme si Lady Gaga replongeait dans ses racines dance, mais en poussant encore plus loin le côté mainstream et lisse. J’avais l’impression d’entendre quelque chose de déjà vu, un patchwork de sonorités électro-pop que l’on a entendues des millions de fois depuis les années 90-2000.

Dès les premières notes d’Alice, l’intention est claire : Chromatica est un album conçu pour la fête, pour l’évasion, pour faire danser. Mais cette approche a d’abord eu l’effet inverse sur moi. Trop uniforme, trop propre, trop calibrée. Contrairement à ses débuts où l’électro-pop servait une vision artistique excentrique et imprévisible, ici, tout semble parfaitement structuré, millimétré, presque clinique. J’ai eu l’impression d’écouter un long set de DJ sans réels moments de surprise.

Mais à force d’écoutes, mon regard a évolué. Derrière cette surcouche de beats saturés et de synthés ultra-lissés, Chromatica révèle une cohérence indéniable. L’album, bien que classique dans sa forme, tient la route. Il n’y a pas de grands écarts de style comme sur Born This Way ou ARTPOP, et cette uniformité joue en sa faveur : tout s’enchaîne sans accroc, formant une expérience fluide et immersive. Gaga, malgré l’emballage grandiloquent, y exprime des thèmes personnels forts : la douleur, le trauma, la résilience.

Certains morceaux ont fini par me convaincre. 911, par exemple, avec son minimalisme robotique et son texte introspectif, devient fascinant avec le temps. Rain On Me, aux côtés d’Ariana Grande, se révèle être une véritable catharsis, un exutoire taillé pour les clubs (même si son côté ultra-produit peut le rendre impersonnel). Sine From Above, avec Elton John, apporte une touche d’émotion et d’expérimentation inattendue avec sa montée frénétique en fin de morceau. Mais malgré ces bons moments, d’autres titres comme Free Woman ou Plastic Doll m’ont laissé de marbre, trop génériques pour vraiment me marquer.

Finalement, Chromatica est un album qui, sans révolutionner quoi que ce soit, accomplit bien ce qu’il entreprend. Il est homogène, puissant dans son exécution, et taillé pour une écoute en immersion. Mais pour moi, il lui manque ce petit supplément d’âme, cette prise de risque qui rendait Gaga si unique par le passé. C’est un bon album de pop électronique, mais pas un grand album de Lady Gaga.

Un projet bien construit, mais auquel j’accroche moins. 6/10.