Le plus hermétique, inaccessible, abstrait, déshumanisé des albums de Zappa. Les dialogues absconds repris des piano people de Lumpy Gravy, la noirceur glacée du Synclavier… on pourrait s’attendre au pire, et les premières impressions peuvent sembler définitives… Après plusieurs écoutes et avec la volonté de suivre le fil de cet opéra pantomime de 2h certains y trouveront peut être la cohérence aussi paradoxale que lumineuse enfermé dans ce labyrinthe sonore qui ne ressemble à rien d’autre. La musique du synclavier s’assagit (parfois) pour réaliser des fresque orchestrales qui n’auraient pas dépareillé au sein des meilleures enregistrements du compositeur, les dialogues aussi risibles qu’anxiogènes finissent par dépeindre de façon palpable cette dystopie narrant les derniers moments de l’humanité, réfugiée dans un piano dissertant sur la Grande Note, les cochons et les poneys…
Ici FZ en bon scientifique fou à conçu méticuleusement un produit sonore alliant la forme la plus aboutie des ses compositions orchestrales aux ingrédients les plus corsés de ses expérimentations passées. Et l’auditeur aventureux peut savourer le résultat fabuleux, improbable, inespéré de 30 ans des efforts du compositeur, comme si les éléments de ses tentatives les plus abstraites (on pense bien sûr à Lumpy Gravy et Jazz From Hell, mais aussi Man From Utopia, Thing Fish ou The Perfect Stranger) s’assemblaient enfin dans une ultime révélation musicale.
C’est repoussant et beau, noir et lumineux, oppressant et réjouissant, c’est définitivement trop, et c’est parfait comme ça.