Rhétorique d'une société vulgaire

Vulgaire, La Rumeur l'est (ou du moins elle l'est devenue après son 1er album)... mais avec "l'art & la manière de faire chier les blairs" car, après tout, elle n'est que le reflet en pleine-teinte du monde dans lequel elle se répand & évolue comme un Poison d'Avril dans l'eau pesticidée...

Mmm... miam miam, je sens l'inspiration gustative poindre le bout de son nez à l'écoute de leur dernière galette.

- Des timbres de voix reconnaissables entre mille que n'importe quel puriste aura grand plaisir à retrouver, franchement, depuis le temps... on n'y croyait plus.

Logique poussée à l'extrême dans le cas présent, il faut savoir se faire rare pour être apprécié à sa juste valeur, complètement à rebours du modèle décadent actuel qui plèbe-plébiscite une surexposition outrancière, à grand renfort de réseaux socio-pathes-putes-pathos siphonneurs de neurones, de données personnelles & de comptes bancaires, en parfaite cohérence avec une consommation de masse de produits formatés, prédigérés & jetables... aux chiottes, à peine ingurgités... une histoire de putrescence programmée.

- Un ton posé, marque de fabrique de ceux préférant aller à l'essentiel car ils n'ont plus rien à prouver depuis bien longtemps déjà.

- Un phrasé/style rapologique toujours aussi épuré & minimaliste qui ne fait que renforcer l'impact des messages dispensés.

- Des paroles loin d'être dénuées d'humour caustique jouant, comme à l'accoutumée, avec les figures de style & les expressions de la langue de Molière pour mieux les détourner, bien loin de la frénésie verbale de leurs débuts car, comme ils le disent eux-mêmes, "ils n'ont plus 20 ans".

En résulte une écoute en boucle qui ne provoque aucune lassitude, tant les rimes peuvent être sources de réflexions à tiroirs multiples.

- Des thèmes se nourrissant de la puanteur de la connerie humaine qui a, plus que jamais, pignon sur rue dans cette société capitaliste en stade de décomposition accélérée, quoiqu'en laissent penser les apparences... dont il faut toujours se méfier.

- Une diversité d'instrus alternant sonorité sombre ("Comment rester propre ?", "Saturé", "Nébuleuse" ) & plus légère ("Souffle", "Capharnaüm", "Ne faisons pas comme si on avait 20 ans", "Rossignol du matin" aka le nouveau "335 Heures" d'Ékoué, "Parquet, moulures et peignoir blanc") qui se marient parfaitement au contenu, le fond & la forme se renforçant souvent mutuellement, preuve d'une alchimie réussie.

Bref, on ne change pas une recette éprouvée qui fonctionne toujours aussi bien.

Le résultat, un produit fini très nourrissant... intemporel... un classique.

Quelques invités, mais aucune trace de leurs comparses d'Anfalsh... plutôt étonnant.

J'aurais probablement rajouté +1 à ma notation si on avait eu le droit à une nouvelle joute collective avec Casey-sensei, Prodige la hâche, Bibi la cagoule (rien à voir avec l'autre trouduc string ficelle), Al de Matières Premières & pourquoi pas Demi-Portion, digne héritier de la Scred Connexion.

booba le bouffon de la (t)rapette FR, porte-étendard vieillissant & vocodé d'une industrie putassière, se pointe alcoolisé en hummer sur scène comme le pauvre connard de pollueur qu'il est, balance sa bouteille de sky dans un public d'adulescents décérébrés au risque d'en amocher un(e) &, pendant ce temps-là, les patrons du rap de fils d'immigrés, surdiplômés (pour 2 d'entre eux), censurés par les radios nationales & sortis victorieux d'un long procès politique initié par cette sous-merde de sarko-rolex, s'adressent à celles & ceux qui ont les pieds ancrés dans la réalité, quoi de plus normal ? Quoi de plus (d)étonnant ?