Robert Fripp, le guitariste progressif qui vous emmerde tous, a un jour eu ce mot fameux : un album studio, c'est comme une lettre d'amour, alors qu'un concert, c'est comme un rencart avec une jolie fille. En filant la métaphore, je dirais que ce Damage est une lettre érotique qui va enfiévrer vos rêves pendant un bon moment, et dont le parfum capiteux aura de quoi faire chavirer jusqu'à l'employé des Postes.


En 1991, l'idée d'une nouvelle réunion de King Crimson est dans l'air. Robert Fripp propose à David Sylvian, pour qui il a joué quelques années plus tôt sur l'album Gone to Earth, d'en devenir le chanteur, L'ex-Japan décline, intimidé par le prestigieux passé du groupe, mais il propose à Fripp de l'accompagner dans la tournée qu'il doit donner au Japon en 1992. L'affaire est entendue, et cette collaboration se passe tellement bien qu'il en sort également un court album, The First Day, et de nouveaux concerts durant l'année 1993. C'est à ce moment-là que se situe l'enregistrement de l'album Damage, qui a connu deux éditions : la première, mixée par Robert Fripp, est aujourd'hui introuvable, mais David Sylvian nous a offert son propre mix du matériel quelques années plus tard.


L'alchimie est parfaite entre le romantisme suave du chanteur, qui domine sur les titres issus de sa carrière solo, et l'agressivité menaçante du guitariste, déjà présente sur The First Day. Trey Gunn et Pat Mastelotto offrent une solide assise rythmique, sans jamais tirer la couverture à eux ni se faire trop discrets (on les retrouvera dans le King Crimson millésime 1994), et la « guitare infinie » de Michael Brook enveloppe l'ensemble dans une atmosphère unique. Le groupe est bien huilé et fonctionne à la perfection, comme l'illustrent les dix minutes de jam sur Darshan (The Road to Graceland). La plupart des chansons s'avèrent nettement supérieures à leurs contreparties enregistrées en studio, qu'il s'agisse des titres plus enlevés où s'illustre Fripp (God's Monkey, Firepower) ou des morceaux plus calmes où brille la voix unique de Sylvian (River Man est transfigurée ; Wave). Et que dire de la chanson-titre ? Si elle ne vous perce pas le cœur, c'est que vous n'en avez pas.


http://www.youtube.com/watch?v=W0Q7N6QLYxc


earthbound, starblind

Tídwald
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le 8 févr. 2014

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Tídwald

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