Face à un groupe comme Belle And Sebastian, on peut dire qu'on est en droit de ne pas attendre grand chose. Allez ! Un peu de pop-folk indie mignonne à faire tomber les cœurs faibles et naïfs, et qu'on répète ça encore et encore et encore. Alors oui, on pourrait se révolter un peu, mais on s'y habitue vite, et peu à peu la bande à Murdoch se glisse inconsciemment dans la case «Machin doux et intimiste à écouter lorsqu'on veut un peu de calme.». On est tellement habitué qu'on voit passer Dear Catastrophe Waitress un peu comme un petit oiseau dans leur disco, «Toc toc - Oui ? - Voici votre soupe fade pour les moments de déprimes. - Oh merci - Pas de quoi.»


Mais il serait trop facile d'ignorer DCW comme une énième resucée d'une recette éculée comme on serait tenté de le faire à la première écoute. Oui, l'album ne fait pas de mal à une mouche, oui, il est aussi doux que votre petit hamster adoré, mais bordel, il faut se rendre à l'évidence : il s'agit certainement de la plus grande révolution de tout le catalogue du groupe ! Rien que les deux premiers titres - constituant certainement leur meilleure introduction d'album ever - sonnera certainement comme une véritable claque pour ceux qui se sont trop repassés If You're Feeling Sinister la veille ! Est-ce juste moi ou Stuart Murdoch est en train d'imiter les Beach Boys ?


De la pop sautillante fourmillant d'arrangements, complexe dans ses changements d'ambiances incessants, avec des harmonies vocales en veux-tu en voilà et qu'on mélange le tout et Step Into My Office, Baby devient la chanson la plus explosive du répertoire de B&S. Mais où sont-ils ? Ces petits gamins qui faisaient de la guitare acoustique dans leur coin ? Même pas le temps de se reposer que la chanson titre reprend le dessus et nous offre la même chose, en pire. Xylophone, instruments à cordes et à vents, c'est un sacré gros bordel qui pète dans tous les sens. Jamais vous n'auriez pu imaginer une telle chose deux ans avant dans un disque de B&S, jamais, bon sang !


Placer ces deux titres totalement déglinguées en introduction n'est - je pense - pas un hasard, il y a chez Stuart une véritable volonté de faire un doigt d'honneur ostensible à son passé, une manière totalement assumée de dire «Maintenant, je fais ce que je veux et je vous emmerde.». Bon, le «Faire ce que je veux» est évidemment à prendre avec des pincettes : le groupe ne va quand même pas se mettre à faire de la musique expérimentale et le reste de l'album le prouve bien. Cependant, un souffle créatif totalement neuf est soudainement apparu, et c'est rafraîchissant !


Inutile d'insister également sur le fait que Murdoch n'a jamais été un manchot pour ce qui est du songwriting, c'est ainsi que cette pincée de sel et d'épice recouvre des titres d'une facture déjà impeccable donnant alors vie au plus luxuriant et au plus excentrique des album de Belle And Sebastian dont le seul défaut est sans doute la longueur. Car il serait en effet mensonger de dire que le style du groupe ne lasse pas sur la longueur. Mais c'est bien le seul.


Ainsi, vous avez le choix : Dear Catastrophe Waitress pour le pendant extraverti du groupe, If You're Feeling Sinister pour le pendant intimiste.

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le 13 août 2015

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