Mine de rien, Gazpacho est un groupe plutôt prolifique en sorties et qui parvient sans trop faire de bruit à se renouveler autour d'albums conceptuels en utilisant au mieux les ambiances et autres instruments délaissés par les groupes de rock progressifs de nos jours. Demon en est la parfait illustration, c'est un album basé sur un livre relatant de la part de mauvais en nous et sur la façon de le découvrir en soi et de l'apprivoiser. Cet album de 4 titres dispatchés
en 8 chez iTunes + 1 titre bonus dénommé The Cage brouille un peu les pistes et n'hésite pas à mettre en avant des instruments à cordes et autres accordéons ce qu ne manquera pas de rappeler l'excellent Tick Tock avec son ambiance désertique et nomade.
I've Been Walking est un titre de prime abord rebutant mais qui parvient à fasciner par ses tumultes et autres méandres mélodiques. Exit donc les guitares électriques et autres refrains et accueillons de vrais moments de bravoure et autres montées en intensité subtiles et entrecoupées de faux extraits de chansons d'autres temps. Le groupe se donne beaucoup de mal pour appuyer les paroles par de beaux enchainements musicaux mais ce n'est pas toujours aussi efficace que prévu.
J'avais déjà remarqué ce petit problème sur Missa Atropos mais le groupe cherche parfois trop l'expérimentation et les longues plages atmosphériques ce qui fini par poser problème aux auditeurs non avertis par le côté "hipster" du groupe. Il est ainsi aisé de se lasser de cet album dès la 5ème ou 6ème écoute tant on a du mal à trouver une ligne directrice forte et logique sur ce Demon. Pourtant, il faudra s'armer de patience et surtout se prendre au jeu avant de tirer la moelle substance de cet album qui se fait certes attendre mais dont le plaisir d'écoute s'en retrouve au final démultiplié.
Death Room pousse l'expérimentation encore plus loin avec son côté introspectif dans sa première partie pour mieux s'alléger tranquillement dans sa seconde partie au bénéfice du piano, spécialité du groupe dans les titres à tiroirs. L'introduction vers la troisième partie ressemble d'ailleurs à s'y méprendre à du Tick Tock, ce qui est loin de me déplaire. On retrouve un peu de rythme et d'allant dans ce finish mais au final on ne décolle toujours pas comme on l'aurait souhaité.
Au final, on ne peut qu'applaudir la performance à l'écoute de cet album dense et complexe mais on garde malgré tout un certain regret qui ne s'estompera qu'au bout de nombreuses écoutes et à la seule condition d'aimer le côté sombre du groupe. On s'éloigne des contrées splendides et autres continents et civilisations oubliées pour se perdre dans les méandres de l'esprit humain et de ses démons. Tout comme cette lutte, cet album ne s'apprivoise pas, il se vit et nous oblige à encaisser quelques coups avant de ressortir satisfait et haletant après cette âpre combat. Ce n'est pas totalement l'album que j'attendais mais je reste confiant que le groupe parviendra à apprivoiser et à contrôler ses pulsions artistiques et musicale pour nous offrir un album à la fois ambitieux et moins arty voir hipster.