Après deux albums formidables, à savoir In My Room (2016) et Djesse Vol.1 (2018), le petit génie Jacob Collier revient de plus belle avec un album qui est peut-être bien le meilleur des trois.
Toujours à la recherche de douceur et d'harmonies singulières, Jacob Collier a peut-être bien écrit parmi ses meilleurs "berceuses" dans cet album, tout en s'éclatant dans d'autres musiques. Il varie toujours plus les collaborations, les instruments, et forme vraiment des mélanges uniques. Aucune musique ne se ressemble, de nombreux styles sont explorés, il y en a pour tous les goûts, et surtout pour les curieux.
La première musique a avoir été postée sur YouTube est Make me Cry, qui met en avant principalement des sonorités de cordes pincées. Ce n'est pas sa première, il y avait notamment Hideway dans l'album In My Room, musique à laquelle il n'hésite d'ailleurs pas à faire référence dans celle-ci, simplement par un petit riff. L’intro de Here Comes the Sun rappelle également Hideway, avec la voix de dodie qui ajoute une touche de sensibilité. Ils parviennent à parfaitement s'approprier la musique des Beatles, en trouvant leur propre couleur et en s’éclatant.
Certaines musiques sont parfois plus calmes, comme Time To Rest Your Weary Head, plus personnelle et mélancolique, avec un simple accompagnement à la guitare, qui clos l’album en douceur.
Mais Djesse Vol. 2, c’est aussi de nouveaux timbres auxquels Jacob n’avait pas encore fait appel. l’Intro, fait d’ores-et-déjà entendre la douce mélodie de la cornemuse de Kathryn Tickell, et les sonorités celtiques persisteront dans Bakumbe, mêlées à une ambiance électronique festive dans un final explosif. Cette musique permet également de profiter de Sam Amidon, au banjo et au violon.
Alors que l’interlude Dun Dun Ba Ba introduit les sonorités africaines en mélangeant les tempi, Nebulayo réunit le chant traditionnel d’Oumou Sangaré avec un fond funky, comme Snarky Puppy l’a fait par le passé avec Salif Keïta, dans Soro de leur album Family Dinner – Volume 2.
Nebulayo, c’est également le solo presque freejazz de saxophone. Nous sommes gâtés en solos, dans cet album : Chris Thile à la mandoline dans I Heard You Singing, Jacob au mélodica dans It Don't Matter – comme il le faisait par le passé, dans Woke Up Today ou Flinstones – ou bien évidemment Steve Vai, toujours aussi bavard, dans Do You Feel Love. Par ailleurs, Jacob Collier en profite pour nous ressortir une intro similaire à celle de With The Love In My Heart tirée de son album précédent.
Mais au milieu de tout cela, il y a une perle : Moon River. A l'origine composée par Henry Mancini et Johnny Mercer, elle est ici harmonisée à la sauce Jacob qui se retrouve accompagné, dans l'introduction, par une bonne centaine de chanteurs/instrumentistes/compositeurs de renoms (à titre d'exemple : Herbie Hancock, Quincy Jones, Hans Zimmer, Steve Vai, Cory Henry, Eric Whitacre... Rien que ça). Cette musique est devenue un standard, et Jacob parvient condenser tout son talent dans 9 courtes minutes de musique extrêmement denses, en témoigne la transcription de June Lee. Jacob retourne à ce qu'il maîtrise le mieux à mon goût, le chant a capella, et nous offre un clip magnifiquement détaillé nous permettant d'admirer l'intégralité de sa garde-robe. Tout comme dans Hideway, il s'amuse à faire fluctuer le la de référence de manière imperceptible, il parvient à trouver des couleurs nouvelles et particulièrement puissantes. Lauréate d’un Grammy Award, Moon River est à mes yeux une pièce majeure dans l'écriture vocale, tous styles et périodes confondues
Il n'y pas album qui soit 100% excellent. Celui-ci ne déroge pas à la règle, mais il y a quand même beaucoup de perles, et l'album vaut le coup rien pour l'existence de Moon River. Jacob Collier a vraiment créé sa propre école, sa propre façon de penser la musique, et maintenant il ne fait qu'explorer. Qu'il continue dans cette lignée.