Duran Duran par Strangeman57

 John Taylor (bass) et Nick Rhodes (claviers) choisissent comme nom de scène celui du savant fou dans  « Barbarella », qui tente de se frotter à l'héroïne sexy. Sexe et science-fiction, voilà d'emblée où se situe l'image du groupe. Pour le son, ils se voient à la jonction des Clash et de Chic. Le projet s'esquisse en 1978 et ce premier essai sort en… 1981… Entre temps, ça se rode en live et les membres jouent à un long jeu de chaise musicale. En 1980, Duran Duran existe enfin dans sa configuration historique, Simon le Bon au chant, Roger Taylor à la batterie et Andy Taylor à la guitare. Entre-temps, leur répertoire aura eu le temps de s'étoffer assez pour intéresser EMI qui les signe.
  Produites par Colin Thurston (qui a travaillé aussi sur le « Lust For Life » de Iggy Pop que sur le « Reproduction » d’Human League, sur le « Heroes » de Bowie que sur le « Party’s Over » de Talk Talk), les neuf pistes qui composent l'album varient entre ce Rock dansant, marquée par la voix en chœur de Simon et la gratte entraînante d’Andy, et quelques passages à l'ambiance plus SF, comme sur « Night Boat » ou « To the Shore », où le clavier de Nick prédomine. Mais c'est vraiment le tout formé par les cinq membres qui rend leur son unique. « Tel Aviv » en conclusion, détonne par ses parties orchestrales, James Bond n'est déjà pas loin.
  Si le style est bien présent, l'ensemble est encore bien trop tâtonnant, léger, inégal, pour juger cette première œuvre entièrement réussie (certains diraient pourtant qu'il est leur meilleur…) Quelques tubes en instance semblent par contre annonciateurs de ceux en puissance qui sortiront sur le reste de la décennie. Outre « Girls on Film » que tout le monde connaît, je retiendrai aussi « Is There Something I Should Know », disponible sur la ressortie américaine de 1983 et certaines face B comme « Late Bar », tout aussi efficaces.
 On ne peut pas parler de Duran Duran sans aborder leurs clips, période MTV oblige, clips qui auront été fondateurs de l'esthétique « Nouveaux Romantiques » comme évoqué dans leur premier single « Planet Earth » : « Like some new romantic/Looking for the TV Sound ». La vidéo qui l'accompagne, réalisée par Rusell Mulcahy (déjà derrière “Video Killed the Radio Stars”) se moque d'une bonne partie des groupes New Wave. Dans un décor futuriste en forme de bloc de glace, Simon Le Bon se déhanche de façon exagérée et Nick Rhodes, sérieux derrière son clavier, semble manipuler une machinerie extrêmement complexe : touche parodique qu'ils reprendront souvent.
  Mais c'est leur troisième single qui les fera exploser, numéro cinq du top dans leur Angleterre d'origine. Tout comme le groupe, « Girls on Films » a connu de nombreuses versions avant d'arriver à celle que tout le monde connaît. Son clip, réalisé par les fameux Kevin Godley et Lol Creme, joue sur une imagerie érotique où sur un ring, des pin-ups luttent contre un sumo, boivent la tasse dans une piscine gonflable ou encore, montent sur un chippendale comme sur un poney. Première vidéo musicale à dépasser les six minutes, première à être censurée sur MTV, autant dire que ce premier acte, même si pas franchement consistant, aura marqué les esprits.*