Milk & Honey
"Le plus connu des musiciens folk sixties dont personne n'aie jamais entendu parler." Ainsi s'exprime très justement un journaliste dans un article dédié à la mémoire de Jackson C. Frank, mort en...
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le 17 oct. 2013
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Y a des groupes comme ça, ils font un peu toujours la même chose tout le temps... Mais c'est pas grave. Tinariwen écume le monde entier (oui, ces Maliens sont d'invétérés nomades, les tournées c'est pas ça qui leur fait peur) depuis maintenant 35 ans. S'il aura fallu attendre 2001 pour que le collectif se décide à nous faire partager son art en studio, ça fait donc des décennies qu'ils rodent, sans montrer de lassitude, leur tishoumaren (nom donné à cette espèce de blues touareg entrainant qu'ils ont contribué à populariser). Si bien qu'on pourrait se poser la question de ce que Tinariwen trouve encore à dire après toutes ces années, qui les auront vu sortir 7 albums studios et donner sans doute des milliers de concerts. Question légitime, mais en fin de compte assez peu pertinente.
Certes, on aura pu voir certaines ouvertures au long des pérégrinations discographiques du groupe ; leur passage sur le label indé ANTI- par exemple aura vu débarquer des featuring étonnants (mais réussis) tels que les apparitions de Nels Cline, TV on the Radio, Dirty Dozens Brass Band, et sur le présent Elwan rien moins que Mark Lanegan dont le timbre rocailleux se marie parfaitement avec les errances désertiques qui l'entourent. Mais la musique de Tinariwen est empreinte d'une tradition orale, qui a pour vocation d'être répétée aux générations en vue d'être perpétrée à travers les âges. Heureusement nos touaregs ne sont pas du genre psychorigide, et si leur formule reste sensiblement la même avec les années ils n'hésitent pas à l'adapter à notre époque et aux circonstances de chaque nouvel enregistrement. Pour le cas d'Elwan en l'occurrence, les Tinariwen ont dû modifier quelque peu leurs habitudes... Impossible pour eux d'aller s'isoler dans leur désert natal pour trouver l'inspiration entre deux tournées, vu la situation politique du Mali en ces heures noires (djihad, chefs de guerre, bonne ambiance) ils ont été forcés de trouver refuge dans le désert américain, dans le fameux parc du Joshua Tree qui a certes hébergé U2 pour un photo-shoot mais qui est surtout le repaire ultime pour ceux qui se réclament du rock du désert – pardon, du stoner rock. On comprend tout de suite mieux pourquoi Lanegan se retrouve invité dans les studios Rancho de la Luna, accompagné de guitaristes inspirés tels Kurt Vile himself ou Matt Sweeney, ou d'un ingénieur du son responsable de rien moins que les premiers albums des Queens of the Stone Age (Alan Johannes).
Ainsi entourés, les Tinariwen parviennent à trouver à nouveau l'inspiration, à plusieurs milliers de kilomètres de leur bon vieux désert, et si l'influence peut s'entendre ici ou là (certains riffs sont bien lourds et fouailleurs comme il faut), Elwan demeure avant tout un album de blues touareg et sonne comme tel. Les guitaristes invités à jouer avec le groupe se sont très volontiers prêtés au jeu et accompagnent plus qu'ils n'imposent leur instrument, tant et si bien que certaines de leurs apparitions sont indiscernables. Tout s'est fait dans le respect de cette tradition que Tinariwen peaufine encore et toujours avec le soin qu'on leur connait. En définitive, s'il ne se détache pas particulièrement de ses grands frères au delà de la touche de tel ou tel guest discret, Elwan demeure un excellent témoignage d'une culture qui ne cesse de nous déclamer ses chants, d'un groupe qui a pleuré plus que de raisons sur l'état du Moyen-Orient ces dernières années et qui avait besoin d'en témoigner à travers leur filtre ensablé. "Ténéré Takhal" ("Qu'est devenu le désert") ne parle pas d'autre chose, les "elwan" (éléphants) du titre symbolisant ceux qui l'ont mis à mal ces derniers temps, ceux qui détruisent les valeurs de solidarité et la tradition.
Ici, vieux baroudeurs comme petits nouveaux ("Nànnuflày" est composée par le plus jeune de la bande) apportent leur pierre à l'édifice. Et moi-même je continue à chanter leur louanges, 8 ans après qu'ils m'aient dérobé un bout de mon cœur en concert, qu'ils continuent à trimballer avec eux à chacune de leurs escales. La passation est assurée.
Chronique provenant de Xsilence
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes 2017 en musique d'une traite dans mon assiette avec mon corps d'athlète et mon œil d'esthète et Les meilleurs albums de 2017
Créée
le 12 févr. 2017
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Cette citation n'est pas de moi, c'est Saitama lui-même, principal protagoniste et « héros » de One-Punch Man, qui la prononce après un énième gros vilain dûment tabassé d'un seul coup...
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