J'ai un ego surdimensionné, et je ne peux pas m'empêcher de me demander : « Est-ce que Lucid a pensé à moi avant de proposer cet album ? »
Puis de me lancer dans des réflexions sur la façon dont il anticipe -s'il s'est livré à ce petit jeu- ma note, mon appréciation.
Allez, inversons les rôles, je vais tenter de deviner ce qu'il a essayé de deviner.


Sur la note :

- Il aime trop cet album pour penser qu'il soit détestable.
- A son avis, il y a 50% de chances pour que je ne sois vraiment pas fan, et 50% de chances pour que ça me plaise bien, voire beaucoup (il n'a pas envisagé la possibilité que j'en tombe amoureux, parce qu'il porte bien son pseudonyme).
- Envisageant les deux possibilités, il a opté pour une brochette large, entre 4 et 7 sous un mauvais jour, et 6 et 8 lorsque le soleil brille.


Sur l'appréciation :

Les aspects négatifs :
- Soyons sérieux : il n'a pas une seconde envisagé que j'adhère aux guitares électriques, au mieux non-désagréables (eh, c'est déjà beaucoup), au pire quand même vraiment détestables (« The noise of carpet », « Metronomic underground »...). Et ça, c'est une faute de goût qui ne se pardonne jamais complètement.
- Il a pu envisager que j'apprécie les batteries. Je pense. Erreur fatale, c'était en somme un peu LA question piège. Oh, elles ne sont pas SI mal. Mais diantre, pourquoi une vraie batterie ? Ce n'est pas quelque chose que je dis souvent, d'autant que la batterie a tout mon respect, mais pour le coup, un bon coup de boîte à rythmes, ça vous change une atmosphère, on voit les choses autrement, et le genre me paraît s'y prêter nettement mieux.
- Il a peut-être pensé que les aspects jazzy de la chose charmeraient le saxophoniste qu'il y a en moi. Tends les doigts, Lucid. Si j'aime le jazz, certains métissages, particulièrement ceux à base de jazz justement, doivent se faire tous petits, parce que ça m'a toujours paru une certaine facilité, à proscrire bien entendu. Exit les sections de vents de « Percolator », ça n'amène rien de bon. Peut mieux faire.
- Il savait que son truc, on a beau le camoufler du mieux possible, bah ça reste une espèce de pop/rock mollassonne, et que je suis très chiant avec ça. Flagblues en a fait les frais, le pauvre, on ne souhaite ça à personne.

Les aspects positifs :
- Oui mais il savait aussi que sa pop mollassonne elle a quelque chose de très rare dans ce genre musical : une âme. Un morceau d'âme, en tout cas, au moins. Armé de la conscience du juste, il propose quand même son truc. (Et peut-être en se disant que dans le pire des cas, bah, l'Adobati il peut bien aller se faire m*****. Et il n'aurait pas tort pour un sou).
- Il sait que son album est parfaitement équilibré, et qu'aucune âme sensée n'oserait faire le moindre reproche sur un truc qui coule tranquillement de A à Z, sans heurts, mais sans trop d'indifférence quand même.
Oui parce que faudrait pas que ce soit trop consensuel, l'Adobati il râle toujours à propos de ça, la facilité, la consensuelité, la propreté, etc.
- Mais en même temps, il va pas continuer, ici y'a quand même des morceaux assez barrés « J'ai très très peur ça c'est certain, j'ai très très peur mais beaucoup moins », un peu méchants, « I hate to see your broken face », en gros de quoi attiser un peu la curiosité quoi.
- Là c'est mon tour de sécher, je ne sais pas s'il est conscient de l'admiration que j'ai pour la curiosité. Curiosité dans le sens de quelque chose qui l'attire chez moi, par l'inventivité, et curiosité dans le sens de quelque chose de curieux, d'étrange.
- Du coup peut-être n'a-t-il simplement pas pensé que j'aimerai beaucoup cette atmosphère qui fait penser à un pendant plus apolloniaque -certes un peu ébranlé- d'un décidément dionysiaque Commercial Album des Residents. Là où je veux en venir, c'est que cet album de pop a des côtés aliens (et aliénants) que j'apprécie. On sent l'expérimentation, on sent un son qu'on ne retrouve sans aucun doute nulle part ailleurs, on sent, ne l'ai-je pas dit plus haut, « une âme » ?
- Il a pu douter sérieusement sur la voix. Sûr que quand on écoute les bavements masculins sur « Spark Plug », y'a de quoi angoisser. Mais des morceaux comme « Les Yper-Sound », « Percolator », rattrapent le tout correctement, et il sait très bien qu'on en vient à oublier les quelques bêtises ça et là. Expérimenter, c'est pas facile, alors on a le droit de se gourer de temps en temps.

Et enfin, il a dû se demander si j'allais avoir la curiosité de creuser le rapport au film. J'aurais dit oui, si j'étais à sa place, et en devant me mettre à la mienne. Mais non, n'ayant pas vu le film, je reconnais que ça m'a paru un peu trop d'efforts pour cet album, et après tout, j'ai bon espoir que quelqu'un le fasse à ma place.


Et bien, Lucid, en te lisant je dirais que c'est une bonne critique, qui représente assez justement ma façon de voir la chose. Je te donne un bon 16/20.

Pour ma part, j'ai hésité entre le 6 et le 7, et sincèrement j'aime vraiment bien, plein de qualités et peu de défauts, surtout pour ce genre que d'habitude je méprise beaucoup et qui me surprend très agréablement ici, mais ça me transcende pas assez pour que je me fende d'un 7 honnête. Je vais appeler ça « Le cas Gang Starr ».
Adobtard
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le 26 févr. 2013

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