Comme vous le savez, depuis début 2020, nous avons été punis par le COVID à cause des scores réalisés par l'album "MILS 3" de Ninho.
Alors que nous pensions que tout s'arrêterait là, en ce vendredi 4 septembre est tombé le top 10 des meilleures premières semaines du rap francophone : https://twitter.com/midiminuit__/status/1301948542215507971
Les français, non contents de faire circuler le COVID grâce à des horribles soirées d'intégrations pour étudiants en manque d'affection, ont aussi décidé de ruiner le moral des quelques personnes encore attachées au rap en donnant de la force et en achetant des projets tous plus horribles les uns que les autres.
Nous avons appelé un médecin, qui a bien voulu pour nous engager le pronostic vital du rap mainstream francophone et expliquer ce qui n'allait pas en ce moment en prenant comme exemple le dernier projet du rappeur PLK, nommé Enna
Elle m'appelle tous les jours, pourtant, moi, j'veux juste la uer-t
Elle m'chante des chansons douces, du genre "Chandon et Moët"
Il explique dans un premier temps :
"Le problème de cette année 2020, c'est qu'elle a été caractérisée par ce confinement que l'on connait tous. Sortir en boite même après ce confinement reste impossible, se rassembler en très grand comité aussi.
Paradoxalement, les rappeurs ont cru bon de nous abreuver de dizaines de morceaux tous plus festifs les uns que les autres, zumbas comme diraient certains, saucisse party comme diraient d'autres.
Outre le jeunisme de nombreux médias et journalistes rap qui nous font passer ces morceaux pour des hymnes club révolutionnant l'industrie, la musique et même la danse contemporaine de boîte de nuit, c'est surtout cette tendance du morceau festif, dansant qui est à déplorer.
Les gens attachés à cette musique en ont marre, bien évidemment, ils entendent toujours le même morceau en boucle, la seule différence entre chaque morceau étant l'emplacement des mots. Mais pour les gens qui n'écoutent que peu de rap, ou simplement pour les gens qui n'écoutent que peu d'artistes, cela ne les gêne pas : ils se font une playlist, la mettent en boucle et passent des soirées tous ensemble dans leur coin.
Le soucis semblerait donc que les maisons de disques, ne pouvant profiter de l'argent des showcases et des prestations scéniques, aient voulu créer un été artificiel depuis de longs mois afin de pouvoir exploiter nombre de disques"
À la base, j'fais du son pour les mecs d'chez moi, j'm'en bats les couilles du buzz
On voulait pas devenir connus, j'suis pas comme tous ces mecs bizarres
Le médecin embraye en nous expliquant pourquoi, au delà de la recherche constante de morceaux dansants et entêtants, la scène du rap francophone mainstream se porte mal.
"Personnellement, je n'ai pas écouté l'album. En effet, je suis débordé et je ne peux pas me permettre de m'infliger une écoute d'Enna. Je viens tout juste de sortir de l'écoute de 100 Visages, de Leto. C'était compliqué. On a toujours besoin de temps pour se reconstruire et se remettre, ça fait 6 mois qu'on nous abreuve de projets comme ça, c'est pénible."
Après cette divagation, il reprend.
"Donc oui, comme je disais, je n'ai pas écouté le projet. Mais regardez le tracklisting. Regardez les producteurs. Écoutez ce qu'il se dit dans le disque. Rien n'est mauvais car Wagram Music peut injecter énormément d'argent dans ces projets. Mais rien n'est bon pour autant. Ces morceaux, on les a déjà entendu, on a déjà entendu les mêmes couplets, les mêmes rappeurs invités. Et même si je n'ai pas écouté, je suis quasi sur que dans le lot, il y a un morceau à la guitare, un morceau boom bap en hommage à ce qu'il a écouté dans sa jeunesse (ndlr : le médecin nous avoue sur ce coup avoir triché et regardé un extrait d'une interview de PLK pendant sa pause clope lui permettant de deviner ça) et 3,4 morceaux, si ce n'est plus, qui sont des copiés collés des morceaux qui ont fonctionné auparavant. Rien est original, mais en plus de ça, PLK mise tout son succès sur la promo. C'est aussi ça le soucis, quand on accorde plus d'importance aux statistiques faites sur les plateformes de streaming qu'à sa musique"
Nan, tu connais pas nos vies (pas nos vies)
Nan, tu connais pas nos vies, arrête de parler pour tchi
Le médecin que nous avons longuement interrogé, la mine dépitée par l'ampleur des dégats, finit par conclure d'un ton maussade.
"Le problème majeur en réalité, ce n'est pas ce disque. Le problème, c'est que nous sommes presque à la fin d'un cycle et que personne ne semble vouloir se bouger pour que la scène reprenne du poil de la bête.
Prenez l'article que vous venez d'écrire. Cet article, aussi pertinent soit-il, est interchangeable. Prenez-le, changez les noms des projets, les noms des rappeurs, des producteurs et recopiez le mot pour mot en parlant d'un autre projet. Tous les propos tenus seront valables pour tous les disques dont il a été fait mention plus haut. Car chaque disque est interchangeable ! "
Le journaliste ayant interrogé le médecin recevant régulièrement des dizaines de mails de rappeurs "underground" afin d'en faire la promotion après une opération sponsorisée par les produits laitiers, il demande alors au médecin si finalement, il ne faut pas compter sur ceux dans l'ombre.
Surement agacé par la tournure de l'interview et du format totalement débile de cet article, il nous rétorque alors une dernière question avant de partir, le pas pressé.
"Tant bien même la scène underground est intéressante et plus créative que la scène "mainstream", n'y a t-il pas un soucis dans le fait qu'il faille fouiller de fond en comble les tréfonds de soundcloud et de youtube pour trouver, par miracle, quelques projets intéressants ?"