Un opus qui ne suscitera pas des vocations
«- Dis Josh, tu penses pas que ça pourrait méchamment poutrer si Eluveitie faisait un album entièrement axé sur le folk présent dans leurs morceaux ?
- Ah ouais carrément, ça pourrait rendre un truc énorme ! »
Appelez moi ou non Nostradamus, mais c’est au Pagan Fest d’avril 2008 que nous avions cette conversation empreinte de réflexion et de philosophie. Attirés tous deux par les passages folk présents dans les deux premiers albums du groupe, nous ne nous tenions plus de joie lors de l’annonce de la sortie d’Evocation I - The Arcane Dominion, album que le groupe promet acoustique et folk. L’idée me plaisait énormément, d’autant que le groupe se permet la classe d’inviter Alan Averill, alias Naihmass Nemtheanga, chanteur de Primordial, groupe que j’apprécie beaucoup, ainsi qu’Olivier Sa Tyr du groupe Faun ou Freddy Schnider, frontman de Nucleus Torn.
Après avoir sorti deux albums de qualité, mélangeant musique traditionnelle (avec l’utilisation d’instruments comme la vielle à roue ou la flûte irlandaise) et un puissant death metal mélodique inspiré de l’école de Göteborg, 2009 se place sous le signe de l’expérimentation. Il n’est pas le premier groupe à se diriger vers ce type d’album. On peut citer Kveldssanger d’Ulver, Damnation d’Opeth, Visor om slutet de Finntroll ou encore The White EP d’Agalloch, tous quatre de franches réussites. Et puis j’aime aussi beaucoup d’autres groupes proposant une musique entièrement folk, comme Omnia ou Faun. Seulement voilà, le premier titre, Omnos, est dévoilé en mars 2009, et il s’avère que je trouve que c’est une sacrée bouse. L’espoir demeure, peut-être que la qualité du titre se révèle après plusieurs écoutes… Ben non, raté, même avec ça, le titre reste assez mauvais. La voix d’Anna ne colle pas à la musique, elle-même très peu inspirée. Où sont passés les rythmes entraînants présents dans les deux précédents albums ? Quand j’ai dit que je voulais du folk, c’était plutôt quelque chose de dansant, qu’il y ait ou non des paroles. Ou bien au contraire, une musique plus en ambiance, des compositions assez recherchées qui faisaient voyager. Avec « Omnos », on n’a ni l’un ni l’autre, juste une mauvaise chanson que je peine à écouter jusqu’au bout. Bon, on garde la foi, le titre n’est pas représentatif de cet album si attendu, pas vrai ? Encore perdu…
L’album sort en avril, il est décevant, surtout par rapport aux attentes qu’en avaient les fans. Plutôt que de nous entraîner dans de folles cadences celtiques (comme il y en avait dans des morceaux comme « Tegernakô », « The Somber Lay », « Calling the Rain »…), le groupe propose trop d’interludes, accompagnés d’une voix que j’ai du mal à supporter. Les morceaux laissent un goût d’inachevé, de bâclé. Les titres s’enchaînent, l’album se révèle trop long, on s’ennuie et plus d’une fois je ressens l’envie de passer à la chanson suivante. Les invités n’apportent que peu de charme à cet opus, alors que leur venue aurait pu donner des titres assez originaux et une alternative à la voix nasillarde d’Anna, que ce soit sur « Omnos », « Brictom » ou « Dessumis Luge ».
Tout n’est cependant pas négatif. Certains morceaux sont sympathiques et mettent de bonne humeur. Vu ce que je vous ai dit ce que j’attendais de l’album, vous ne serez pas étonnés que les morceaux qui retiennent mon attention soient les plus dansants, comme « The Cauldron of Renascence » (même si elle est un brin répétitive). Je parlais tout à l’heure de « Brictom », dont la voix féminine gâche la musique qui est derrière, assez sympathique. Et, surprise des surprises, même un titre lent, « Within the Grove », arrive à me plaire. Il n’est pas trop long, ce qui ne nous donne pas le temps de nous ennuyer, et présente une ambiance assez agréable, tout comme « Gobanno », un morceau qui se révèle au-dessus de la moyenne, qui prend petit à petit son envol avec l’ajout progressif des instruments puis de la voix (malgré le côté répétitif du rythme principal). Une autre bonne surprise se présent avec « Voveso in Mori », morceau plus varié et dont la voix est nettement meilleure que sur les autres titres chantés par Anna.
Eluveitie a choisi de prendre un risque en proposant un album orienté folk, pour moi, le pari est perdu. Tout n’est pas à jeter dans cet opus, qui révèle quelques passages sympathiques. Mais l’ensemble se révèle médiocre, avec trop de mauvais titres, la voix d’Anna qui est loin de me convaincre. L’album s’étire dans la longueur, l’ennui s’empare de l’auditeur, heureux d’arriver enfin à la conclusion de cet opus. Le digipack propose un medley des parties folk de Slania, plus attrayant que n’importe lequel des morceaux d’Evocation I - The Arcane Dominion, ainsi qu’une version metal d’« Omnos », aussi mauvaise que l’originale.