Conan s'est imposé extrêmement rapidement dans la scène Doom par un son titanesque et des rythmiques briseuses d'os. Le groupe semblait pousser dans un nouveau retranchement les musiques plombées en prenant une approche "fantasy doom warrior", jusque-là pas suffisamment exploitée.


À la fin de la décennie 2000 et au début des 2010’s, le Doom avait justement besoin d’un renouvellement et de l’émergence de nouveaux groupes phares. C’est à ce moment qu’ont débaroulé tous les Conan, Elder, Uncle Acid, Subrosa et autres Bell Witch pour réinsuffler du sang neuf dans la scène.


Mais il ne suffit pas de pondre un album qui fait sensation pour devenir un taulier du Doom. On connaît l’exigence des fans du genre et il faut bien veiller à mettre les petits plats dans les grands après le premier succès pour convaincre ce public vivement critique.
Elder a réussi à renouveler le son de « Dead Roots Stirring » avec « Lore », Subrosa a su transformer l’essai de « No Help for the Mighty Ones » avec « More Constant Than the Gods » et Bell Witch a enchaîné « Four Phantoms » et l’ineffable « Mirror Reaper ».


Mais qu’en est-il de Conan ? Après le large succès d’estime de « Monnos », les Britanniques ont bossé pendant deux ans sur son successeur « Blood Eagle », régulièrement considéré comme le meilleur album du groupe.
Le problème s'est toutefois rapidement posé sur la capacité du groupe à se réinventer ou tout du moins à proposer quelque chose de différent par rapport au dernier album. « Revengeance » avait ce mérite d’essayer deux-trois choses. On restait sur du Conan à poils longs mais deux trois passages frénétiques venaient relever la recette.


Avec un album studio tous les deux ans (5 albums depuis 2010 !), les Britanniques sont à un rythme quasi-industriel et semblent ne pas véritablement se préoccuper du renouvellement de leur art.
Pour résumer, faire des albums de 6-7 morceaux avec un chant hurlé à travers une grotte et des riffs qui te font péter les cervicales comme du papier bulle, c'est chouette un moment mais pas éternellement.


« Existential Void Guardian » tombe en plein dans cette lacune. Après trois écoutes, je peine encore à trouver un titre qui sort du lot et qui pourrait faire office de single.
Peut-être choisirai-je « Volt Thrower », le titre le moins conventionnel de l’album. Ce morceau bénéficie d’un riff de marmule qui caresse les pulsions les plus animales de l’auditeur avec une rythmique syncopée tout à fait dingo.
Mais quand la première chose à se mettre sous la dent arrive au bout de la cinquième piste sur sept, il faut se poser quelques questions.


Les deux premières pistes, « Prosper on Path » et « Eye to Eye to Eye » se déroulent sans la moindre surprise, dans le plus pur style Conan. Il m’a toutefois semblé que « Prosper on Path » faisait pédale douce sur la lourdeur pour offrir quelque chose de plus tranchant et de plus affûté (même si un morceau allégé de Conan reste plus gras que 90% des productions du genre).
« Paincantation », le morceau le plus court de l’album (un peu moins d’une minute) rappelle l’essai de blast avec le morceau « Revengeance » sur l’album du même nom, mais ce n’est pas vraiment suffisant.
À côté de ça, « Amidst the Infinite » et « Vexxagon » sonnent comme des chutes de studio des albums précédents. Riffs basiques, chant éternellement scandé et batterie de caverne déjà entendue ; l’insolence de leurs débuts n’est plus là.
« Eternal Silent Legend », l’ultime morceau, essaie un léger contrepied en offrant un morceau plus minimaliste, moins sourd mais tout aussi lancinant. Malgré cela, le morceau est à l’image de l’album : convenu et prévisible.


Alors que d’habitude ce genre de choses ne m’intéresse pas, j’ai jeté une oreille aux pistes bonus, des versions Live de morceaux cultes du groupe (« Hawk as Weapon » ou « Foehammer ») et je trouve ça franchement moyen. Enregistrement cradingue et voix à la peine n’arrangent rien et rendent ces quatre pistes supplémentaires à réserver aux fanatiques absolus du groupe (et encore).
Récapitulons : quatre morceaux plutôt plats, un interlude bourrin et deux titres relativement sauvables (« Volt Thrower » et « Eternal Silent Legend »).


En lui-même l'album n'est pas si moyen mais quelle tristesse de voir un groupe se résigner à stagner, à produire strictement la même chose d'album en album.
Je donne donc ce 5 comme je donne une sanction. Qu'un groupe de leur ampleur se satisfasse d'un album aussi peu inventif est tout à fait regrettable. Regardez Yob, regardez Elder, ce sont des groupes qui parviennent à se renouveler, à enrichir leur univers sonore à chaque album.
Si je veux écouter un album de la trempe de « Monnos », ben j'écoute « Monnos ».
Parce que plus ça va, plus Conan le barbare se transforme en Connard le barbant.


Créée

le 16 oct. 2018

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Raton

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