Il est nécessaire avant d'incendier cette 'oeuvre' de dire que je respecte profondément Green Day ; ce groupe me suit depuis mes premières amours musicales, le premier album que j'ai acheté n'étant autre que American Idiot quand je n'avais qu'une dizaine d'années. C'était alors comme une entrée dans le monde du rock, et du punk, de l'apprentissage des concept albums ; bref, honnêtement, même avec le recul, je ne pense pas qu'il y aurait pu y avoir de meilleur baptême auditif. S'ensuivirent de nombreuses découvertes musicales liées au mouvement punk et au rock globalement. Bref, Green Day m'a beaucoup servi musicalement, notamment avec le reste de leur discographie.
Puis, il y a eu les albums depuis American Idiot : le très bon 21st Century Breakdown, l'inégal mais plutôt bon triple album Uno, Dos, Tré ; et Revolution Radio qui amorça, selon moi, le déclin de mon groupe fétiche. Du coup, comme après toute déception, il en va d'une certaine prudence et j'étais clairement inquiet à l'annonce de Father of All. Encore plus avec les communications successives du groupe et de Billie Joe en particulier ; toujours plus avec les premiers singles. Et le pompon quand j'ai su qu'ils allaient faire une tournée avec Fall Out Boy et Weezer. Loin de moi la volonté d'être désobligeant, mais bon, j'ai toujours considéré ces deux groupes comme mineurs voire médiocres (surtout le premier nommé), en tout cas oubliables. Qu'allaient-ils donc faire dans cette galère ? Et puis bon, à l'écoute de Father of All, j'ai compris que c'était du même niveau. En tout cas, indigne de Green Day dans mon esprit encore marqué par American Idiot, Dookie, Warning ou Shenanigans.
C'est simple, dans cet album, rien n'est à sauver. Rien n'est agréable. Cet album pue la flemme à des kilomètres. La durée : 26 minutes. Dix pauvres chansons qui ne dépassent même pas les trois minutes. Alors certes, la durée ne fait pas forcément la qualité, mais venant d'un groupe auteur d'un chef d'oeuvre nommé Jesus of Suburbia qui dure neuf minutes (que certains considèrent, dans un certain excès, comme le Bohemian Rhapsody du punk) ou de Homecoming, quasi la même durée ; et surtout ce cher Billie Joe qui nous sort qu'il déteste les chansons longues et qu'il ne veut plus rien écouter dès que ça dépasse trois minutes, c'est clairement du foutage de gueule. J'ai l'impression que le groupe se sabote tout seul, en reniant ce qui a pu faire son succès. Sans parler de l'esprit punk qui est mort depuis plusieurs albums déjà. Non pas qu'il faille être dans une révolte systématique et permanente, mais bon, quand on dresse les Ramones en modèle, qu'on reprend les Clash, on évite de pondre ce genre d'albums. Précisément, même dans les sonorités ça n'a plus rien d'électrique, pas même de mélodieux ; certaines chansons portent le sceau d'un mix foireux, ça devient juste inaudible. On dirait des ados excités dans leur garage. Jamais je n'ai été agacé par un album de Green Day jusqu'à présent, même Revolution Radio avait quelques petits élans comme la chanson éponyme, Bang Bang ou Troubled Times, mais là, cet album est détestable. Même les paroles ne sont plus à la hauteur, j'ai l'impression qu'ils n'ont juste plus rien à raconter, tout est devenu stérile.
Apparemment, il s'agit d'un album pour faire danser... Ah oui ! Du coup, on s'en fout des lyrics. Bref, chacun peut ambitionner ce qu'il veut et désirer n'importe quelle reconversion, mais personnellement, je n'avais aucune envie de voir Green Day devenir un groupe pour fêtes de village.
Pour conclure, bien sûr, ma critique peut sembler acerbe, sans doute critiquable elle-même, mais elle est celle d'un admirateur trahi de Green Day. Oui, j'ai beaucoup évoqué American Idiot, mais le groupe lui-même en fait la référence avec sa pochette (ignoble). Et pour moi, même ça tombe à plat, malgré la symbolique.
Terminons sur ce constat :
- en 2004, Billie Joe Armstrong hurle son cri anti-guerrier à travers le monde dans Holiday à l'heure où les USA foutent le bordel en Irak ; l'album se nomme American Idiot, sa pochette dessine un bras brandissant une grenade.
- en 2020, Billie Joe Armstrong hurle Oh Yeah ! en tapant des mains, voulant que les gens dansent, à l'heure où Trump, contre lequel il s'est opposé plusieurs fois depuis la campagne du bonhomme, gouverne les USA. L'album est Father of All, avec le même bras, mais on ne voit plus la grenade, juste une petite licorne au premier plan, déboussolée, ou ivre, je ne saurais déterminer.
Autant avouer que j'espère que la grenade va faire péter cette licorne, histoire de ne pas devoir définitivement devenir nostalgique pour apprécier Green Day.