Guess what! I'm back !
Je ne sais plus écrire de critiques, aussi demande-je un peu d'indulgence pour ce qui va être tout un tas de blabla sans queue ni tête.
Je me suis rendue compte tout récemment que ce que je croyais être une capacité à articuler des choses qui semblaient n'avoir aucun rapport entre elles, la "free association" que je me targuais de maîtriser presque naturellement n'est en fait que la résultante du chaos de mon surmoi écartelé entre tyrannie et licence de transgresser, et l'obsession d'en découdre par les mots. Et vous allez me dire quel est donc le rapport avec Fiona Apple?
Il est là : sur "Fetch the Bolt Cutters", Fiona allie habilement l'envie de désirer, d'aimer, avec l'envie d'être seule, un ilot dans le Monde, comme un arbre qui tomberait dans la clairière sans que personne ne l'entende, et pourtant elle est là. Tyrannie de l'autre, perçue ("Whatever you do is gonna be wrong"), ou réelle et brutale ("You raped me in the same bed your daughter was born in"), qui octroie la licence de transgresser, de se révolter, ("Kick me under the table all you want, I won't shut up"). Une tyrannie de l'autre insupportable parce que jamais vraiment distancée du soi tyrannique, de la tyrannie qu'on s'inflige volontiers ("people like us we play with a heavy balloon"). Rappel d'un thème que Fiona Apple affectionne : dans Paper Bag, elle écrivait déjà "Hunger hurts, but starving works".
Chercher les solutions de ce conflit insoluble en étant son propre martyr mais aussi (et c'est ça qui rend cet album joyeux voire jouissif, enfin !) en s'affirmant complètement par l'appropriation des paroles d'autres à son égard ("Shameika said I had potential" / "I'm pissed off, funny and warm, I'm a good man in a storm" / "My dog and my man and my music, is my holy trinity"). L'autre en miroir, l'autre qui sauve de l'isolement en transperçant le tyran par l'empathie, parce qu'il est "même" - l'autre qui est donc une femme.
Fiona sait que le mal s'étend parce qu'on le perpétue en passant nos blessures sur un autre ("Evil is a relay sport..."). Fiona sait qu'il en est de même pour le bien. On panse parce qu'on a été pansée.
Fiona finit l'album en étendant toute son empathie, toute sa compassion envers les femmes - celles qui subissent, celles qui viennent après nous dans la vie d'un homme (ou d'une autre femme), celles qui viennent après nous dans l'intime de quelqu'un - Fiona leur enjoint de sortir du second rôle, de s'incarner dans sa propre vie.
Barbara disait dans une interview il y a bien longtemps "Les hommes m'ont accouchée". Les hommes comme fer de lance de la libération. J'ai le sentiment qu'ici Fiona dit l'inverse et réclame quelque part une vérité universelle : celles qui accouchent, ce sont les femmes.