Flesh Tone
5.5
Flesh Tone

Album de Kelis (2010)

En pleine discographie de Kelis (dans le cadre de ma lecture de « The Neptunes & Timbaland » de Maxime Delcourt), j'avais envie de revenir sur cet album, anomalie dans sa carrière et sans doute aussi le plus raté après son précédent « Kelis Was Here ». Déjà, sur celui-ci, Kelis se cherchait dans un format beaucoup trop long, 18 pistes, alors même qu'elle s'était trouvée sur « Tasty » et ses tubes, qu'ils soient produits par Pharell ou non. Mais en 2009, elle se cherchait au point d'accepter la proposition faite par son ami Will.I.Am - avec qui elle a déjà eu un tube en feat. avec Busta Rhymes - de produire un album EDM, dans l'air du temps. J'imagine qu'elle a aussi accepté pour la thune, puisqu'elle a été payée entre 50000 et 175000$ pour l'enregistrer ; ça aide ! Et Will.I.am, lui, l'a sûrement choisi pour la singularité de sa voix, soulful, versatile et subtilement rauque. Après tout, pourquoi pas non plus la porter dans la case Dance Floor ?


« Flesh Tone » commence par une intro de Burns, première production du bonhomme pour une autre que lui-même ; il travaillera par la suite avec un tas de Pop-Stars que j'ai la flemme de citer. Et autant dire que si l'album avait été aussi bon que cette « Intro » de SF, révélant le potentiel inédit entre la rigidité électronique et le timbre chaleureux de Kelis, nous aurions eu là une reconversion réussie pour la nouvelle reine des boîtes de nuit. Mais les ennuis commencent dès le deuxième morceau « 22nd Century », produit par Boyz Noise, pourtant pas un mauvais bougre, un tas de projets intéressants en début de carrière... On y retrouve deux soucis majeurs qui seront présents sur le reste de l'album.


Le premier, aussi bons que soient tous les hooks ou les mélodies présents sur la galette, aucun morceau ne semble vraiment réussir à les exploiter correctement voire même, réussir à démarrer pour provoquer ne serait-ce qu'un déhanchement de ma part. Prenons le titre suivant « 4th of July (Fireworks ) par DJ Ammo - surtout connu pour son travail avec les Black Eyes Peas ; aussi vibrante que soit l'interprétation de Kelis sur son « Nothing I'll ever say or do Will be as good as loving you », jamais ce passage ne sera exploité de façon à provoquer l'émoi qu'est censé provoquer ce genre de musique, en montant en puissance... ou juste en choisissant les bons arrangements, pour ne pas donner l'impression que Kelis est seule, accompagné d'un DJ en roue libre derrière.


Bon, quand je dis aucun morceau, j'exagère, David Guetta arrive étonnamment quelque chose d'assez extraordinaire avec son « Acapella ». Comme à son habitude, il ne se fait pas chier, son instru est dépouillée de tout, ne gardant qu'un beat efficace et une bass synthétique martelant la même note. Ce minimalisme laisse à Kelis toute la place que sa voix mérite mais surtout, provoque son petit effet à 1:22 lorsque la bass change de gamme pour devenir synthé et atteindre enfin les étoiles. Il ne l'a peut-être pas fait exprès mais si oui, le parti-pris était osé, surtout pour un premier single. Mais ne vous inquiétez pas, notre cher David retombe dans ses travers habituels avec « Scream ».


Deuxième gros soucis, et il est de taille puisqu'il vient du mixage (ou du mastering) : l'album est compressé avec les pieds. Je ne suis pas (encore) expert ! Mais ça s'entend punaise que des sonorités sont soufflées par trop de compressions, qu'elles galèrent à se faire une place, donnant alors une production qui veut sonner trop fort pour sonner vrai et riche ! J'ai beau eu changé de casque ou de site de stream... ça s'entend notamment sur les pièces signées par les frères Benassi, où tout ce qui est cymbal-hithat-rim est à moitié effacé par les claviers. Puis de toute façon, ce sont les pièces les plus médiocres de l'album (les Benassi s'en sortiront mieux avec le « I'm Addicted » de MDNA deux ans plus tard).


« Flesh Tone » est un bordel assourdissant qui n'est ni un bon album de Kelis, ni un exercice réussi d'EDM. Il y avait du potentiel (je peux encore citer « Home » et son gimmick synthétique infernal) mais la façon dont il a été exploité donne un sentiment profond de gâchis... et des envies de remixes car la chanteuse y est sublime. D'autant plus que s'il a divisé (encore une qui fait la même chose que les autres !), le disque a tout de même rencontré son public, au point que son interprète était censée sortir une suite dans une veine plus Garage. Cette suite ne viendra pas et heureusement, Kelis nous quittera en 2014 sur une bonne note, même sa meilleure note avec « Food ». Se perdre pour mieux se retrouver.


Strangeman57
5
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le 16 févr. 2024

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