Avec ce premier album, France Gall inaugure une nouvelle carrière après une triste (mais étrangement créative) traversée du désert. Après un succès fulgurant dans sa période Yé-Yé, elle s'est retrouvée bien démunie face au déclin de son succès. Mais voilà que, suite à un coup de foudre (artistique), elle se met en tête de faire écrire Michel Berger pour elle. Après une amorce sur un titre du mélodiste (« Mon fils rira du rock'n'roll » sur Chansons pour une fan), Berger lui offrira « La déclaration » en 45t, et lui écrira/composera/produira ce premier album éponyme. France Gall cesse alors d'être la Poupée de cire pour entrer enfin dans l'âge adulte.
Pourtant, à l'écoute de l'opus, la rupture n'est pas aussi nette qu'on celle qu'on attendait. Les textes sont simples, les chansons sentimentales. L'album évoque les sentiments naissant entre le compositeur et son interprète. Ils sont timides et tendres, se cherchant l'un et l'autre. Certaines paroles ne sont pas sans évoquer l'insouciance Yé-Yé, et pourtant nous n'y sommes plus.
La patte de Michel Berger est reconnaissable. L'album bénéficie d'une production dans la lignée des deux premiers Véronique Sanson et du Message personnel de Françoise Hardy, soit d'une véritable modernité pour l'époque. Cela donne sans aucun doute du corps à l'apparente légèreté de l'écriture, sans compter les mélodies accrocheuses. Mentions spéciales à « La chanson d'une terrienne (partout je suis chez moi) » qui louche vers le rock progressif et « Je l'aimais », conclusion qui redynamise un album très (trop?) doux.
Le nouveau répertoire de France Gall se veut dorénavant plus cohérent et résolument moderne. Michel Berger a sans aucun doute apporter une nouvelle fraîcheur à sa carrière, et devient alors son auteur-compositeur attitré. Il ne nous décevra pas pour les quelques albums qu'il lui produira tout au long des années 70 et 80 sans trop se répéter.
France Gall semble s'être « trouvée », et c'est tant mieux pour elle. A l'écoute de cet album, on pourrait toutefois penser que ces chansons perdent toutefois en diversité et souffre d'un style plus « lisse ». Bien sûr, on ne crachera pas sur le son Berger, mais nous n'oublierons pas trop vite les quelques perles – inentendues, parfois improbables – d'avant 1975.