Autant j'aime l'interprétation que Gould en a donné au piano et suis stupéfait par sa virtuosité et le ralentissement qu'il a opéré dans son ultime enregistrement des Variations, autant je préfère cette interprétation de Gustav Leonhardt au clavecin. Se détacher un peu de cette querelle qui vire parfois à l’affrontement un peu exagéré car nous avons le choix selon notre sensibilité et c'est tant mieux.
Le clavecin, selon moi, produit une sonorité et une occupation de l'espace qui siéent mieux à la composition initiale (oh la porte ouverte enfoncée) et nous permet de mieux nous imprégner de cette oeuvre ou au moins tenter de le faire. Je ne sais pas comment l'expliquer mais la "concrétion" du son est différente.
Ces Variations sont aussi celles d'un monde et d'une sensibilité que notre modernité rend peut-être difficile à appréhender. Il est difficile d'abandonner un peu de nous pour franchir cette distance. La puissance d'évocation de l'oeuvre demande de soi des efforts. C'est une théorie personnelle mais c'est peut-être pour cela que l'interprétation au piano est bien plus connue car plus facilement accessible.
Ce qui est beau dans cette oeuvre, et là c'est délicat et on marche sur des sables mouvants car dire c'est beau est un peu le degré zéro de la critique (et pourtant c'est beau), ce qui est beau donc est l'introspection qui peut naître de cette écoute* et le vagabondage des pensées.
Peut-être que nous portons en nous chacun un morceau de ces Variations Goldberg, dans notre réception bien sûr. Il n'y en a pas une meilleure qu'une autre car nous la relions chacun à quelque chose qui nous est propre et pourtant difficile d'exprimer.
- et il faut vraiment écouter c'est à dire ne rien faire d'autre en même temps. Car ce temps d'écoute est du temps arrêté.