Si Steven Wilson n'est pas le plus avenant des personnages (ni le fils de Brian), nul doute qu'il est l'un des plus intéressants musicalement des 20 dernières années, que ce soit avec son groupe Porcupine Tree ou à travers ses multiples side projects. Et pourtant, je n'avais pas vraiment accroché à ses albums solo, qui étaient certes très bons mais m'ont toujours semblé un peu froids. Je n'avais donc pas d'énormes attentes vis à vis de ce Hand. Cannot. Erase. Et bien j'avais tort.


Joyce Carol Vincent a été retrouvée morte dans son appartement de Londres en 2006. Plutôt banal me direz-vous, mais ce qui l'est moins, c'est qu'elle était morte depuis 2003, personne ne l'ayant trouvée avant. C'est à partir de ce fait divers sordide que Steven Wilson tisse son album, l'occasion pour lui de développer des thèmes qui lui sont chers comme l'inaptitude sociale et l'isolement que produisent les nouvelles technologies, la vie moderne nous rendant paradoxalement plus proches et plus éloignés que jamais de nos congénères.


Vous savez combien j'aime quand un album raconte une histoire, développe une idée, met en musique ce que le compositeur a à l'esprit mieux que ne le ferait un long discours. C'est ce que fait à la perfection cet album, sa plus grande réussite certainement.


Ce n'est pas tout ; alors que les précédents albums solo de Steven Wilson restaient cantonnés grosso modo à un seul style, sorte de rock progressif mélancolique à forte coloration 70s, cet album est beaucoup plus protéiforme, empruntant à tout ce qu'a pu nous proposer l'anglais dans sa carrière. Ce sont 30 ans de carrière musicale qui sont condensés ici en un album, des riffs torturés de Porcupine Tree période In Absentia (3 Years Older) à l'electro-rock de No-Man (Perfect Life) en passant par cette pop mélancolique qui le caractérise tant et qui infuse tout l'album.


Le tour de force est que l'album reste toujours cohérent ; et ce grâce à cette atmosphère typique des compositions de Wilson qui colle à merveille à ce nouveau concept. C'est le cafard du dimanche soir qui s'évade de sa petite case pour envahir chaque jour de la semaine, à croire que Steven Wilson mange chaque jour en tête à tête avec lui depuis trente ans pour nous produire à chaque fois des albums aussi déprimés.


Comment finir cette critique sans citer le morceau-fleuve Ancestral, qui commence en douceur sur des beats électroniques, enchaîne sur le doublé solo de flûte/solo de guitare, invite la douce voix féminine de Ninet Tayeb le temps d'un refrain et termine en beauté par un enchaînement triple-combo arpèges/riffs torturés/errances psyché ? 13 minutes de pure grâce.


Je sais pas ce que vous attendez en fait, regardez-vous, les bras ballants, on dirait des pingouins, jetez-vous dessus ! À la fois une porte d'entrée idéale pour le néophyte et l'aboutissement d'une carrière prolifique, Steven Wilson vient sûrement de sortir le meilleur album de sa carrière et en plus il est à la fois varié, accessible, riche de sens... Vous êtes encore là ?

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le 9 mars 2015

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Nordkapp

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