Mogwai, ce groupe de Glasgow, l'un des pionniers du genre, qui enfile les merveilles depuis 1995, entre Come on die young, Happy Songs for happy People, Rock Action, et le plus austère Mr Beast, injustement décrié.

Mogwai, ce groupe pionnier et phare du post-rock, adepte autant d'envolés grattesques et noisy à la sonic youth que d'electro
Et voilà donc arriver, en grande pompe et assez allègrement promu, la dernière mouture des Ecossais, Hardcore Will Never Die but you Will.

Si le titre peut aisément décrocher la palme du meilleur titre d'album de l'année, en revanche, le contenu peut déstabiliser, voire même un tantinet décevoir. Voilà, j'ai vendu la mèche, j'ai tué le suspens dans l'oeuf, j'ai spoilé la fin de votre film, je suis un monstre.

Le dernier Mogwai m'a déçu.

Ce n'est pas qu'il manque d'audace ou qu'il repompe des recettes préexistantes, c'est pas non plus qu'il manque de patate ou qu'il n'invente rien. C'est même pas un mauvais disque en fait. C'est juste... c'est... chiant. Voilà, le nouveau Mogwai est chiant.

Ca commence pas trop mal, pourtant, avec un White Noise classique, mais assez efficace pour passer tout seul. Peut-être desservi par une production trop clean, trop nette, mais passons. Le second morceau, Mexican Grand Prix est une jolie tentative de synth pop kitschouille mais assumée avec l'ironie habituelle dont fait preuve le groupe. Mais ce Mexican Grand Prix ne décolle pas, ne s'engouffre dedans aucune folie, aucune déraison, et c'est un peu amer que j'entame la suite.
C'est au troisième morceau que j'ai compris ou avait déraillé l'album : Mogwai n'y croit pas. Mogwai applique les formules qui leur ont toujours servi pour concocter des morceaux de haute volées, mais la recette ne prend pas sur cet album, et l'auditeur s'inquiète un brin.

On voit clairement sur Rano Pano, un Mogwai qui cherche sans y croire, qui tente d'inventer sans motivation. Le groupe a l'air de s'ennuyer à jouer, leurs assauts sonores en screwdriver ou noyés de larsen ne prennent pas, les références aux années 80/90's (qui semblent être la justification du titre de l'album) manquent cruellement de folie, d'inventivité. Tout est bas du front, grisailleux. Où est passé le Mogwai qui pondait des titres aussi dingues et puissants que Sine Wave, Hunted by a Freak ou You don't know Jesus? Des trucs qui irradiaient littéralement, à vous fondre les cavités auriculaires, à foutre vos tympans en fusion délicieuse, des flots destructeurs de lave divine? Ici, point de tout ça, malgré une production encore une fois impeccable. Non, c'est juste trop propre, trop sage.

Au pire, Mogwai sonne comme un mauvais groupe de synth pop, au mieux comme un groupe moyen de post-rock, comme on a pu en voir se pointer des centaines depuis quelques années. San Pedro est à ce titre le morceau le plus inutile que les écossais aient pu pondre depuis... Depuis toujours, en fait. Sans début ni fin, sans vraie ligne directrice autre qu'un motif répété en crescendo, finissant abruptement, il servirait presque d'interlude, s'il ne durait pas le temps d'une piste à part entière.

Plus reposé, plus serein, Letters to the Metro joue la carte du jazz et du souterrain, avec une instrumentation éparse, quelques arrangements minimaux, un piano comme squelette, des guitares plaintives, un morceau qui aurait pu donner le change et apporter un souffle à l'album, mais qui ne décolle pas non plus, qui n'apporte ni chaud, ni froid. Mogwai s'ennuie, bordel, et je commence également à me faire chier sec. C'est con, ça partait bien, cette ambiance un peu étouffée, un peu suitante. Mais comme le reste, mon enthousiasme retombe.

Du coup, au début, je me suis demandé si j'étais vraiment objectif (la réponse est non), et si je ne jugeais pas les morceaux à partir d'une première impression décevante. Mais non. Même après plusieurs écoutes soigneusement espacées, même en ayant la meilleure volonté du monde d'en dire quelque chose de bien, ça ne prend pas. Je ne retrouve ni la folie destructrice et destructurée de Rock Action, ni les mélodies saturées et imparables de Happy Songs, ni la versatilité de Mr Beast. Ici, tout est trop propre, trop carré, presque prévisible. Mogwai fait du Mogwai, et voudrait faire autre chose, témoin ces incursions electropop, ces constantes références aux décades passées. Le tout est trop propre, trop clean, trop timide pour convaincre vraiment.


Et c'est triste, parce que sur la fin de l'album, on peut retrouver un peu de cette vigueur d'antant, de cette fougue maîtrisée qui a fait leur réputation, avec la superbe montée en puissance de Too raging to cheers, et surtout ce you're Lionel Richie, qui revoit Mogwai revenir toutes griffes dehors et toutes guitares reglées sur 11 pour un final époustouflant après une longue montée savamment minimale... Pourquoi tout l'album n'a-t-il pas été conçu avec la même force? Pourquoi le reste semble-t-il trop restreint, trop convenu? Pourquoi Mogwai semble-t-il s'ennuyer ici? Peut-être qu'après six albums presque tous fabuleux, peut être qu'après seize ans de carrière, Mogwai se demande si ce qu'il fait est vraiment pertinent, peut-être que Mogwai voudrait aller vers complètement autre chose, peut-être cherche-t-il une porte de sortie. Je ne sais pas, et ce n'est pas à moi d'émettre d'aussi stériles spéculations. Reste le fait que je viens de dire du mal d'un groupe que j'aime, et que je me sens aussi mal que sale.

Le hardcore ne meurt pas, mais il vieillit, et moi avec lui.
eukaryot
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le 4 avr. 2012

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eukaryot

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