Dans la discographie pléthorique des Nits qui se poursuit aujourd’hui, « Hat » arrive en 1988 après « In The Dutch Mountains » l'album qui leur a ouvert les portes d'une certaine reconnaissance et surtout au milieu de ce qui est sans doute leur meilleure période, la plus créative et celle où ils ont été les plus reconnus (1985-1995 pour être plus précis). C'est-à-dire juste avant les chefs-d'œuvre incontestés et incontestables que sont « Giant Normal Dwarf » et « Ting ». Le groupe est alors un quatuor constitué du chanteur et guitariste Henk Hofstede, du claviériste Robert Jan Stips, de la contrebassiste Joke Geraets, et du batteur Rob Kloet. Bon, pour être clair, ce « Hat » est un mini-album avec 6 titres pour 23 mn seulement. Oui, c’est court, mais il vaut mieux 23 mn sublimes que 50 mn où on frôle l’ennui (ça arrive de temps en temps, non ?😉).
C’est un résumé de leur musique inclassable. Un univers qui semble simple en apparence seulement, avec des mélodies souvent sublimes, des ambiances variées, aériennes voire oniriques, d’où des merveilles pop qui n’appartiennent qu’à eux même si bien sûr l’héritage de grands artistes comme les Beatles ou Leonard Cohen est parfaitement revendiqué : “The Train”, en particulier, nous fait rencontrer la musique de Hofstede dans ce qu’elle a de plus charmant, sans toutefois mettre de côté ce que la vie peut avoir de sombre ou d’éprouvant, mais d’une façon légère, suggérant des scènes, à peine dessinées et sollicitant ainsi notre imagination. La musique est à l’unisson, adoptant une orchestration très simple, sans beaucoup de production. Le synthétiseur de Stips est là pour évoquer des ambiances sonores, des lieux ou des paysages (« The House »…), dans ce groupe qu’on pourrait presque ranger dans la catégorie des “musiques acoustiques”, tant Robert Jan, Joke et Rob se mettent totalement au service de la guitare et de la voix de Henk. Une merveille qui ouvre cet EP. « The Hat » ou encore « The Dream » figurent aussi parmi leurs grandes réussites avec une instrumentation parfaitement maîtrisée et cette voix chaleureuse de Hofstede, légère, douce et qui sait pourtant faire vibrer et se faire plus grave quand il le faut, plus mélancolique. Pas de guitare ou de basse électrique avec eux, c'est le piano qui est l'instrument principal avec pour accompagnement un peu de percussions.
Un conseil : la musique des Néerlandais se déguste au calme, pas le genre à servir de musique de fond, il faut prendre le temps d’y entrer car leur univers se mérite mais une fois dedans, impossible d’en sortir, on l’explore encore et encore, découvrant à chaque fois des détails insoupçonnés. Même sur leurs albums un peu moins réussis (il y en a forcément sur 50 ans de carrière !), on reste éberlué par tant de finesse et de beauté. Écoutez « Les Nuits » (2005) par exemple, un de leur plus beaux albums et essayez de rester de marbre. L’avantage de l’addiction à la musique des Nits, c’est qu’elle est parfaitement sans danger, au contraire, elle devrait être remboursée par la Sécurité Sociale tellement elle fait de bien😄 !!! Cette “pop de chambre” dont on ne voit pas comment elle aurait pu naître ailleurs qu’en Europe représente un apport essentiel des Nits à la musique populaire, ce pour quoi nous ne les remercierons jamais assez. Fin 2023, ils ont sorti un nouvel EP « Tree House Fire » qui évoque encore en 6 chansons l’incendie qui a ravagé en 2022 leur local à Amsterdam. C’est avec ce mini album qu’ils ouvraient leur magnifique tournée anniversaire des 50 ans ! Pas très joyeux, certes, mais d’une beauté confondante.