18 titres et... Rien à jeter.
Finalement, Joanna Newsom ne s'est pas absentée si longtemps, son dernier disque datant de fin 2006, ce n'est que trois petites années qui se sont écoulées entre temps. Pourtant le temps a paru bien long sans elle, il faut avouer que Ys se plaçait haut la main comme le meilleur album de sa promotion et l'un des plus importants de cette décennie. 5 titres pour pas loin d'une heure de musique de poésie pure où chaque chanson semble se réinventer à chaque fois, où l'impression de découvrir des détails inédits qui étaient passés inaperçu jusqu'ici revient sans cesse, une œuvre inépuisable, intemporelle et surtout indispensable. Après un tel exploit, comment ne pas trépigner à l'idée d'un troisième opus, si on savait depuis un moment que la belle préparait quelque chose en dévoilant de nouvelles compositions sur scène, la libération est finalement arrivée en ce début de 2010 avec une annonce sous la forme d'une mini bande dessinée publiée sur Drag City pour le moins mystérieuse.
Et puis est arrivée cette nouvelle terrible, épouvantable ! Joanna Newsom nous a concocté un triple album ! On peut penser tout le bien qu'on veut d'un artiste, balancer trois disques en pâtures a de quoi faire douter n'importe qui. Parce qu'ici les albums qui dépassent une heure, on en est rarement friand... Trop de titres bouche trou, trop de longueurs, trop de lassitude ce qui conduit irrémédiablement à l'ennui et à l'écœurement. Quand on se retrouve alors avec entre les mains trois galettes représentant plus de deux heures de musique, le doute est permis...
Et aux premières écoutes c'est ce qui arrive fatalement, on ne peut s'arrêter de penser à ce qu'il aurait pût être si elle n'avait gardée que la moitié voire le tiers des titres pour rentrer dans les standards actuel. Alors, oui, avouons le, on aurait encore eu le droit au troisième chef d'œuvre consécutif de l'artiste ni plus ni moins. Mais c'est bien le seul reproche que l'on pourra faire à ce disque et il est à relativiser. Parce que bon, d'accord, quand on se lance dans cette épopée musicale on est partit pour deux heures de minauderies mais si l'on devait s'amuser à faire une liste des chansons superflues elle resterait vide. Dix-huit titres et rien à jeter, de Easy collant des frissons dès l'ouverture grâce à la voix fragile de Joanna Newsom aux grondements orageux clôturant à merveille Does Not Suffice. Pendant ces trois années, la Californienne n'a pas chômé réunissant ainsi une bien belle collection d'éclatant bijoux.
Depuis ses débuts, la copine de la star de SNL (Adam Samberg) impressionne pour la qualité de ses compositions. Aussi élégantes et inspirées, on ne lui à toujours pas trouvé d'équivalent. Unique en son genre, elle navigue entre ses deux précédents opus, de la brièveté des compositions de The Milk-Eyed Memder qui alternait harpe et piano, aux longues fresques complexe de Ys où elle privilégiait son instrument fétiche. Ici, on avoisine les 6 minutes en moyenne laissant aux chansons se développer sans être interminables mais nombre d'entre eux restent quelque peu insaisissable en multipliant les ponts et pirouettes mélodiques. Ajoutez à cela le grand nombre de titres, il est toujours aussi difficile d'apprivoiser la musique de cette étonnante artiste. Et c'est sûrement l'une des grandes forces de Joanna Newsom nous surprendre encore et encore malgré les écoutes qui se suivent et qui se multiplient.
De mémoire, impossible de se remémorer quand est ce qu'on avait pris autant de plaisir à l'écoute d'un album aussi dense. Disons le clairement, Have One On Me est encore une fois un grand album qui sans doute pas au niveau des deux premiers mais qui vaut largement le détour. Joanna Newsom confirme cependant qu'elle fait partie de ces grandes artistes actuelles, peut être la plus grande, qui aura su en trois albums inventer une certaine forme de folk aidée par de grandes compositions. Et une fois de plus, Have One On Me est un disque qui, en étant dans le prolongement naturel de ses deux premiers efforts, est à la fois stupéfiant, rare et inégalable... Rien que ça.