Attention ! Vous êtes non seulement devant un des meilleurs albums du post-punk. Mais également en train de contempler une des plus belles pochettes de tous les temps (la photo a été prise sur une plage dans le sud du Pays de Galles si vous voulez tout savoir). Je ne suis pas certain que vous vous rendiez compte de l’importance de ce disque.


Crocodiles était immense, surtout de la part d’un groupe débutant. Heaven Up Here l’est tout autant. Seulement, pas forcément pour des raisons similaires.


Ce deuxième jet des Echo and The Bunnymen est mystérieux, sombre et psychédélique. A l’image de sa fabuleuse couverture, il a des allures d’œuvre pleine de doutes. Pourtant, elle est celle qui fut la plus facile à enregistrer pour eux. L’explication étant qu’ils ont su s’imprégner de l’atmosphère d’une époque. Terriblement noire et pessimiste dans le post-punk. Une ambiance parfaitement restituée par le grand producteur Hugh Jones. Son travail donnant une couleur particulière à leur musique. Une couleur d’un bleu profond et donc un éclat en accord avec cette décennie des années 1980. Je reviens à cette pochette qui aura été, décidément, complètement en accointance avec son contenu.


Néanmoins, si on excepte le son, la musique des Hommes Lapins de Liverpool n’a pas changé. Il s’agit encore de ce post-punk aux accents héroïques. Grâce à la voix puissante et expressive de Ian McCulloch. Aux épiques cascades de guitare du talentueux Will Sergeant. Sans oublier des rythmiques démentielles de la part de Les Pattinson et Peter de Freitas. Notamment, ce dernier, dont le jeu, tout en roulement, apporte un punch nécessaire aux compositions.
Un exemple ? Le menaçant « Over the Wall » bien entendu ! Son synthé accusateur. La performance de McCulloch qui joue un homme plein de doutes au point d’en devenir déchirant ("Hold me tight !"). Le moment où Sergeant envoie la sauce avec un riff grandiloquent. Tous ces éléments en font un sommet.
L’autre single, « A Promise », est aussi une parfaite carte de visite pour cette formation. Un titre inoubliable au refrain pop gothique et toujours accompagné d’une guitare rivalisant avec le meilleur de The Edge. A ce sujet, on retrouve la ligne de basse de « With a Hip » sur le « Indian Summer Sky » de leurs rivaux. On ne peut pas trop en vouloir à U2 pour cet emprunt tant Pattinson est inspiré sur ce coup-là !


Cependant, la musique d’Echo n’inspire pas que des sentiments grandioses nous donnant la force de soulever des montagnes. La mélancolie et la tristesse sont bien évidemment présentes. Écoutez le tribal « All My Colours » dont l’interprétation par leur chanteur aux cheveux en pétards est poignante. « The Disease » et « Turquoise Days » prennent même une tournure atmosphérique qu’on leur connaissait moins.
Le psychédélisme a pris aussi une place nettement plus importante. « It Was a Pleasure » est très confuse, tel un mauvais trip à l’acide. Un maelström sonore dynamité par les rythmiques de Freitas et percé par la voix grave de McCulloch. Un OVNI démontrant que ce groupe pouvait se montrer expérimental. Même chose pour la chanson éponyme dont la cavalcade rythmique évoque une crise de manque chez un drogué. « All I Want » est également orné d’étonnants arpèges à la sonorité Indienne. Peter y apportant, en prime, sa contribution avec sa frappe pour donner de la puissance à ce morceau.


Vous m’avez compris. J’insiste beaucoup sur cet extraordinaire batteur qui est une pièce importante de l’échiquier Echo and The Bunnymen. Son jeu puissant, agile et diversifié étant responsable d’une grande partie de leur réussite à cette période. Ce qui explique pourquoi leur carrière n’aura définitivement plus la même saveur en son absence.


En attendant, le quatuor reste dans la cime de la hiérarchie post-punk et le succès commence à pointer le bout de son nez (Heaven Up Here rentre dans le top 10 des charts anglais et parvient à se faire une petite place dans les classements américains). On ne pourra pas dire qu’ils l’ont volé.


Chronique consultable Forces Parallèles.

Seijitsu
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le 23 sept. 2017

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