Imaginez-vous féru de récits historiques, d’épopées guerrières, que vous liez et relisez, en vous imaginant faire partie de l’histoire, eh bien ce live, Hell on Wheels, c’est comme vi vous vivez directement les conflits, comme si vous étiez téléporté au beau milieu de la bataille et que vous pouviez déchaîner votre passion et votre rage à l’assaut contre l’ennemi. Vous vivez en direct votre passion, vous êtes transporté.

Je ne vais pas m’étendre outre-mesure sur les morceaux, car c’est déjà fait dans les critiques précédentes. Seules quelques variations, inhérentes à une prestation en concert, leur apporte une nuance qui permet de les apprécier un peu différemment, des ornements qui les assaisonnent pour être dégustés avec une saveur inexplorée. Je vais brièvement évoquer toutes ces variations de saveur, lorsque celles-ci valent le coup d’être mentionnées.

The Spirit Horse of the Cherokee est jouée bien plus lentement pour les couplets, Eric Adams livre, avec une aisance toujours plus surprenante, une prestation vocale majestueuse, le final est bien moins tonitruant et apocalyptique que sur la version studio toutefois.

La superbe intro de Hail and Kill, différente de celle de la version studio, nous surprend agréablement. Elle est jouée avec un calme riche en émotion auquel on adhère volontiers, grisé par tant de beauté inattendue. Le final est lui aussi superbe, mais cette fois, fini la
douceur, il est plein de hargne !

Army of Immortals ne parvient toujours pas à m’emballer…sauf la fin, où Eric Adams dévide l’écheveau de ses capacités vocales pour offrir au morceau le tonus qui lui manque.
Plus de dix minutes de zinbouibouinerie avec DeMaio et sa basse ténue qu’il malmène de ses grands doigts. Fidèle à lui-même, Joey DeMaio veut montrer qu’il est là, que c’est lui le patron. Fier, il bombe le torse pour faire ressortir son marcel en cuir et joue de la basse…comme il en a envie. Des notes saccadées précèdent des arpèges aux accents hispaniques, avant que le dionysiaque ne s’en mêle de nouveau. Il fait des trucs, il s’exprime, et la foule le regarde, les auditeurs l’écoutent. C’est…du Joey DeMaio.

Wheels of Fire est un véritable séisme, à neuf mille neuf cent quatre-vingt-dix-neuf mille trilliards sur l’échelle de Richter. Quelle performance, encore une fois ! Les quatre bougres, en transe, parviennent à mêler vitesse, puissance, rage et beauté comme personne. L’auditeur, saisi par cette hargne, ne peut s’empêcher de devenir marteau.
Black Wind, Fire and Steel comporte ce segment dionysiaque, cette transe musicale Manowaresque, à cheval entre la fougue et la démesure.

L’authenticité inhérente à une prestation musicale jouée en concert (un live quoi, bougre de têtu qui refuse d’utiliser des mots anglais) parvient à rendre Carry On plus intéressant, plus palpable pour l’auditeur, car moins taillé pour la radio. Mais bon, ça ne m’empêche pas de chanter à l’unisson comme un irrécupérable connard.

Battle Hymn est une réussite totale. Ce riff, cette atmosphère, cette inépuisable ligne de basse, véritable soutien rythmique simple, efficace et majestueux à la fois, jamais cela ne cessera de me faire vibrer jusqu’au plus profond de mon être. L’apothéose est atteinte lorsqu’Eric Adams, à l’issue du solo, exhorte le monde entier à sonner la charge vers la glorieuse chevauchée. Et cette fin…plus de cinq minutes de dionysiaque Manowaresque pur, une invitation à rejoindre leur univers artistique, l’ouverture des portes de leur palais créatif unique, la fin de l’album, l’apothéose. Dès que la chanson commence, je tape le poing sur mon cœur comme un colossal cuistre, les premières notes m’invitent à l’apogée du bonheur. Le passage calme est toujours aussi chiant, mais ce qui suit nous invite plus que jamais à sonner la charge, et l’on meurt d’envie de rejoindre la troupe, à minuit, soutenus par dix mille hommes livrant bataille côte à côte !
Mais le morceau absolu de l’album reste Blood of my Ennemies. Joué à Sao Paulo, ce fragment de perfection musicale vient bénir le public brésilien qui ne pourra jamais se remettre d’une telle apothéose émotionnelle. Comment rendre un morceau parfait encore meilleur ? Eh bien, cet album nous livre la réponse : le vivre en concert avec le groupe. Tout ce qui était porté au pinacle sur la version studio de la chanson parvient encore à dépasser les limites de la qualité, les bornes de l’intensité émotionnelles. Une des chansons avec laquelle je vibre le plus, tout groupe confondu. La ligne de basse du refrain me hantera jusqu’à la fin de mes jours. Ineffable.

On reconnaît très souvent un bon groupe de musique via leur capacité à être bons en concert, c’est à-dire la capacité de faire vivre à son public les émotions qu’il recherche en écoutant telle ou telle chanson. Le concert change obligatoirement du studio, et lorsqu’un groupe réussit à ne pas dénaturer son produit en le jouant « sans artifice », c’est une réussite. Mais lorsque le produit est amélioré, sublimé, alors c’est un grand triomphe. Avec ce premier album live, Manowar parvient à atteindre le grand triomphe : tous leurs classiques sont améliorés, seule la fin de Cherokee souffre par rapport à celle de la version studio. L’énergie dionysiaque inhérente au quatuor est capturée de manière brute, rendant leur prestation inoubliable.

Ubuesque_jarapaf
9

Créée

le 10 août 2022

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