Difficile à croire mais le groupe britannique Florence + the Machine fête cette année ses dix ans d'existence. Dix ans que la formation nous transporte entre brillance, puissance et fragilité grâce à trois albums poignants qui ont suscité un enthousiasme critique et populaire. Dix ans que la belle rousse flamboyante nous impressionne et nous hante avec ses grandes et belles mélodies émotionnelles.
Après un troisième opus How Big, How Blue, How Beautiful sous le signe d’une confidence post-rupture intense, leur nouvel album marque clairement un nouveau cap à la fois artistique et humain pour le groupe mais surtout pour la chanteuse et poète (disons le) Florence Welch: "J’ai toujours quelque chose à prouver." dit-elle au New York Times.
Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle s'est donnée corps et âme pour ce High As Hope, profondément introspectif, intimiste et captivant. Accompagnée par le producteur Emile Haynie (qui a signé pas mal de titres de Lana Del Rey), Florence s’est en effet davantage impliquée dans le processus de création mais aussi dans l'écriture du projet, signant tous les titres de ce projet très personnel.
Je me suis rendue plus vulnérable et me suis un peu éloignée de l’aspect métaphorique [de l’écriture]. Cela a créé une bravoure, un courage créatif. Je me suis dit que c’était OK de se dévoiler."
C'est ainsi qu'elle évoque sans retenues ses expérimentations sous drogues dans June ("I’m so high, I’m so high / I can see an angel"), ses années de jeunesse troubles, son addiction à l’alcool et son anorexie avec Hunger dans lequel elle explique qu’à partir de ses 17 ans, elle a commencé à se sous-alimenter, pensant combler un vide de solitude par l’amour et la drogue. Avec ce titre puissant, Florence se libère de son passé sinueux pour finalement crier à quel point l’amour de soi est important.
L'album brille par son audace, notamment sur Big God, produit par le tendancieux Jamie xx avec les quelques notes de saxophone de Kamasi Washington (qui a travaillé sur le Pimp a Butterfly de Kendrick Lamar) mais aussi par ses envolées plus dépouillées que jamais où Florence frôle la douceur céleste comme sur Sky Full of Songs et surtout le déchirant The End of Love, qui m'a personnellement terrassé, où elle raconte son amour pour New York. Ce n'est d'ailleurs pas la seule ville à laquelle la belle rousse fait référence; le titre South London Forever dresse un portrait d'un Londres mélancolique et magnifique qu'elle affectionne tant.
L'admiration est également un thème exprimé par la chanteuse à travers Patricia, hommage flamboyant dédié à son idole Patti Smith, une des pionnières du punk qui a tout de même fait sa place malgré l’oppression de l’industrie musicale masculine de l'époque; le titre déchire, tout simplement. Il est précédé par le sublime Grace, une lettre d'amour à sa sœur dans laquelle elle s'excuse de son comportement chaotique de l'époque avec énormément de regret, le tout dans une tendresse déchirante de sincérité :
I’m sorry I ruined your birthday you had turned 18
And the sunshine hit me and I was behaving strangely
All the walls were melting and there where moments everywhere
Hearts flew from my hands and I could see people’s feeling.
L'album se termine par No Choir, une piste libératrice où Welch chantonne des "La da da da da", elle se montre plus sereine et peut donc clore le disque en beauté.
Ce High As Hope est peut-être l'opus le moins accessible de la carrière de la formation, beaucoup moins "immédiat" que les précédents, mais cette galette introspective et intimiste n'en est pas moins superbe. Florence Welch a un jardin secret, High As Hope en est la clé et n'hésitez pas à l'emprunter, il y fera bon de s'y promener.